David Laufer, auteur d'une remarquable histoire de l'Ukraine pour Heidi.news, vit à Belgrade et analyse à chaud les derniers événements. Des manifestations monstres secouent la Serbie depuis l'effondrement de la gare de Novi Sad, qui a fait 15 morts en novembre. Le premier ministre et son équipe ont démissionné le 28 janvier. Quant au président Aleksandar Vucic, ces événements semblent indiquer que son règne touche à sa fin. Tentative de bilan.
Le 1 novembre 2024, l'auvent de béton de la gare de Novi Sad, deuxième ville du pays, s'effondrait sur les passants, causant la mort de quinze personnes. La corruption, endémique en Serbie, est immédiatement devenue le premier suspect de cette tragédie. Dès le lendemain, les étudiants, rejoints par les paysans et de larges franges de la société, sont entrés en rébellion ouverte contre les autorités. Trois mois plus tard, ces manifestations ne faiblissent pas, mais s'intensifient.
Les revendications ne ciblent pas seulement la figure du président, elles exigent aussi, intelligemment, dans un pays habitué au pouvoir personnel, l'application des lois et le fonctionnement des institutions. Mardi 28 janvier, le gouvernement de Milos Vucevic, ancien maire de Novi Sad à l’époque de la construction de la gare, est tombé. La révolution semble irrésistible, mais elle est encore loin d'avoir atteint ses buts.
Il y a là un paradoxe. Car dans les faits, la Serbie de 2025 se porte beaucoup mieux que celle de 2014, date à laquelle Aleksandar Vucic, un tribun de 54 ans admirateur de l’ex-dictateur Slobodan Milosevic, en a pris les commandes. On peut citer le salaire moyen, passé en dix ans de 330 à 900 euros. Des centaines de kilomètres d'autoroutes et de voies de chemin de fer et de nouveaux aéroports ont été construits. Le paysage urbain a été modifié et modernisé en profondeur. Le taux de croissance du PIB avoisine les 4% pour 2024 et, selon la Commission européenne, sera d'environ 5% pour les trois ans à venir. De presque 20% en 2014, le taux de chômage est tombé à 8% en dix ans.
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