C’est oui, mais pas un blanc-seing: le conseil communal de Château-d’Oex a donné le 12 septembre son aval au dézonement d’une zone agricole pour réaliser un projet agrotouristique hors normes, «Votre Cercle de Vie», dont nous vous parlions déjà en 2020. Son bâtiment principal a déchaîné les passions depuis ses premières esquisses. La mise à l’enquête avait suscité 48 oppositions.
C’était un vote très attendu, qui plaçait le Pays d’Enhaut devant un choix existentiel. Les débats ont été intenses dans le village et les opposants ont toujours la possibilité de recourir contre une décision à bulletins secrets prise à 29 voix pour et 17 contre.
Une ferme du futur qui réunit sous un même toit production d’énergie, hôtellerie, restauration et agriculture durable, porté par un couple d’agriculteurs dont la femme, Esther Mottier, affiche un caractère bien trempé et un charisme indéniable. Elle était un personnage important de l’Exploration de Heidi.news sur le génie fromager de l’Etivaz, dans le Pays d’Enhaut, ainsi que la figure centrale de mon documentaire de 2021, Le Pari d’Esther.
Le projet Votre Cercle de Vie est inédit pour la Suisse, à tous les niveaux: allure qui tranche avec les chalets traditionnels à deux pans, dimensions, diversité d’activités sous un même toit, innovations écologiques et sociales ainsi que son coût: 45 millions de francs. Le dossier est soutenu par la municipalité, la promotion économique locale, le Canton, le Parc naturel Gruyère Pays-d’Enhaut, des centaines de partenaires privés agrégés au fil des ans, des entreprises majeures comme Romande Energie ou Grisoni. Dans le dossier préparatoire, le seul préavis négatif est un avis consultatif de la Commission fédérale pour la protection de la nature et du paysage (CFNP). Elle pointait en 2022 l’atteinte importante au paysage que représentait le projet… Mais reconnaît dans le même texte qu’à proximité immédiate, d’autres atteintes «graves» avaient déjà eu lieu.
«C’est un sujet sensible, qui divise la population», a reconnu Maximilien Stauber, municipal rapporteur du projet. Prises en compte dans le préavis des municipaux et dans le rapport de la commission, tous deux favorables au projet, les oppositions formelles portent notamment sur la construction et ses conséquences. «Les nuisances de chantier en particulier sont évidentes», dit Maximilien Stauber. D’autre part, le bâtiment une fois fonctionnel entraînera une augmentation probable du trafic routier, bien qu’il promeuve les mobilités douces.
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Ce qui a pesé dans la balance, pour l’exécutif communal, ce sont les retombées économiques, en particulier les emplois: «59 postes de travail, c’est beaucoup pour notre région», poursuit Maximilien Stauber. Concernant l’incertitude sur la viabilité économique, les élus ne s’estiment pas compétents. «Si les banques estiment que ce n’est pas viable, elles ne prêteront pas les fonds, et le terrain retournera en zone agricole.»
Quant à la localisation au cœur du village et le volume, les municipaux constatent qu’il n’existe pas d’autre lieu pour accueillir une telle construction, et que la nature même du projet implique «un système architectural compact.»
Les réticences plus émotionnelles se sont exprimées après le vote, au bar le Caribou, où se sont retrouvés certains opposants notoires qui ne souhaitent pas donner leur nom. En les écoutant, ce n’est tant pas la question de l’architecture qui revient, «ce gros bateau encastré dans le terrain», mais l’ampleur du projet. Pour une commune épargnée par l’urbanisation galopante qui a cours ailleurs dans le canton, cela paraît «trop grand».
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