L’Allemagne se rend aux urnes ce dimanche pour des élections législatives très attendues. Quels sont les enjeux? Entretien avec Claire Demesmay, titulaire de la Chaire Alfred Grosser à Sciences Po Paris et chercheuse associée au Centre Marc Bloch à Berlin

Dans quel état d’esprit l’Allemagne se rend-elle aux urnes?

L’élection a lieu dans un sentiment global d’insécurité. Le modèle économique allemand est fortement fragilisé par l’évolution du monde. Il reposait sur trois piliers: un approvisionnement énergétique bon marché, des exportations fortes et une sécurité peu chère, car confiée aux Etats-Unis. Or ces trois piliers vacillent. Cela nourrit la crainte d’un déclassement économique et social, conforté par des faits réels, comme les difficultés de Volkswagen, un des symboles de la puissance industrielle de l’Allemagne. La guerre en Ukraine est un autre élément d’insécurité. Les Européens, et les Allemands en particulier, se pensaient dans un monde sûr, avec comme assurance vie une relation transatlantique solide. Ce n’est plus le cas et Berlin n’a pas des moyens militaires adaptés. La troisième forme d’insécurité concerne l’identité: qui sommes-nous, qui allons-nous être? Cela se traduit dans un discours très dur sur l’immigration qu’incarne l’AfD.