L’Union européenne a publié un document détaillant ses propositions pour soulager le secteur agricole. Le texte propose notamment de ne pas importer des produits qui ne respectent pas les normes de l’UE et de développer des outils pour lutter contre la «concurrence déloyale»

Sous la menace d’une guerre commerciale tous azimuts, l’Union européenne dévoile mercredi sa «vision» pour le monde agricole, s’engageant à limiter l’importation de produits qui ne respectent pas les mêmes normes environnementales que les siennes. La Commission est sous pression pour proposer des mesures pour soulager le secteur, un an après les manifestations nourries d’agriculteurs, de Paris à Varsovie et jusque sous ses propres fenêtres à Bruxelles.

Dans son document d’une vingtaine de pages, que l’AFP a consulté avant sa publication prévue en milieu de journée, figurent peu de propositions précises ou chiffrées. «La première mission de cette vision est de faire baisser les tensions et d’apaiser les acteurs», explique Luc Vernet, du cercle de réflexion Farm Europe, décrivant un contexte «ultra sensible», où «tout le monde est à fleur de peau». «C’est donc un texte extrêmement prudent. Dans le contexte géopolitique actuel et un an après les manifestations, la Commission ne veut pas se lier les mains et veut avancer à tâtons», note-t-il.

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La question de la réciprocité

Parmi les rares mesures détaillées dans ce texte, le commissaire européen à l’Agriculture, Christophe Hansen, propose donc d’explorer à nouveau la question de la réciprocité des normes. En clair: de s’assurer que les produits agricoles importés respectent les mêmes exigences environnementales que ceux produits en son sein.

Il cite notamment le cas des pesticides, promettant de veiller à ce que les produits les plus dangereux, interdits sur le continent pour des raisons sanitaires et environnementales, «ne soient pas réintroduits par le biais de produits importés». Cette mesure est chère à la France, qui porte ce combat depuis plus de trois ans, et inaugure samedi son 61e Salon international de l’agriculture.

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L’exécutif européen entend également développer une panoplie d’outils pour lutter contre la «concurrence déloyale de pays tiers», dossier particulièrement brûlant deux mois après la conclusion de l’accord de libre-échange avec les pays latino-américains du Mercosur auquel les agriculteurs européens sont vivement opposés. Et face aux menaces répétées de taxes douanières américaines et chinoises.

Simplification, simplification, simplification. Reprenant le mot d’ordre de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen, qui veut réviser une ribambelle de textes européens jugés trop contraignants, le document présenté mercredi appelle aussi à libérer les agriculteurs d'«exigences réglementaires complexes». Sans expliquer véritablement comment.

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Un accueil timide

Le projet prévoit également une réforme de la politique agricole commune (PAC) qui répartirait mieux les aides pour les agriculteurs «qui en ont le plus besoin». Cette «vision» de la Commission européenne a pour l’heure reçu un accueil timide des milieux écologistes et agricoles.

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«Dans le monde agricole, ça sera “ok très bien il y a des déclarations d’intention, mais maintenant on attend du concret”», prédit Luc Vernet, de Farm Europe. Cette stratégie «d’apaisement ne suffira pas parce qu’on est dans un secteur qui est en perte de vitesse rapide», insiste-t-il.

Pour l’eurodéputé des Verts, Thomas Waitz, «c’est super que le commissaire se rende compte qu’il faut interdire les pesticides les plus toxiques» et «que nous avons besoin de plus d’équité quand il s’agit du commerce international». Mais «alors comment pouvez-vous soutenir l’accord commercial du Mercosur?», dénonce-t-il.