CHRONIQUE. Les récents incendies dont les images ont fait le tour du monde réactivent chez les Californiens le souvenir de catastrophes passées. Mais le changement climatique à l’œuvre laisse entrevoir un désastre inédit. Pour prendre la mesure de ces deux temporalités, convoquons Joan Didion
Les incendies qui ravagent Los Angeles et ses environs ont comme un avant-goût d’Armageddon, qui vient frapper la civilisation occidentale dans ce qui est simultanément son coin de paradis et l’un de ses centres névralgiques, où se concentrent le pouvoir de l’argent, la modernité technologique et l’industrie du spectacle. La Californie occupe une place stratégique dans l’imaginaire occidental, qui ne tient pas seulement à ses richesses objectives. Pointe extrême de l’Occident, elle représente le bord ultime de son expansion, mais aussi l’horizon lointain où son regard se perd, pour mieux peut-être se projeter sur le reste monde, en refusant de s’incarner dans des frontières définitives.
Rien ne sera donc plus comme avant? Les collines sont défigurées, les villas réduites en cendre, les plages idylliques soudain tristes et grises. Et pourtant, un bref regard en arrière suffit pour comprendre que la Californie est coutumière de ce genre de catastrophes à répétition que favorise la nature du climat et de la végétation. Ils scandent les décennies antérieures, avec quelques dates qui ressortent tout particulièrement, comme celles des incendies de 1933, de 1961 et de 2018, si proches et déjà oubliés. On peut donc appréhender l’incendie actuel, en fonction de l’importance qu’on donne au réchauffement climatique, comme un point de bascule ou comme un simple événement saisonnier, un peu plus grave que les autres. N’est-ce pas là deux visions alternatives de la temporalité humaine?
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