ÉDITORIAL. La pandémie n’est plus, mais ses multiples conséquences se font encore sentir. Alors que nous n’avons pas encore tiré toutes les leçons du covid, le silence qui entoure cette période interpelle
Que faisiez-vous le 30 janvier 2020? Cette date n’a pas marqué les esprits comme celle du 11 septembre 2001. Les Britanniques s’en souviennent comme du jour de la ratification de l’accord de retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne. Faisant par la même occasion les gros titres des médias. Mais un autre événement, moins médiatisé, a pourtant plongé le monde en alerte rouge. Tedros Adhanom Ghebreyesus, le patron de l’OMS, déclarait que l’épidémie de Covid-19 était une «urgence de santé publique de portée internationale», le plus haut niveau d’alerte de l’agence onusienne.
Sur le moment, le monde a regardé ailleurs, préférant suivre la saga de la première procédure de destitution de Donald Trump. En Suisse, les autorités venaient d’annoncer que le risque d’importation de l’épidémie dans le pays, et en Europe, était «faible». Les morts chinois semblaient trop loin pour pouvoir nous atteindre.
Pour aller plus loin
Le Covid, 5 ans après – Nos articles
La suite, on la connaît. Le premier cas, le premier mort, les hôpitaux submergés, les confinements et déconfinements, les masques, le vaccin et le reste. Bref, on garde tous en nous quelque chose du covid. Pourtant, cinq ans après, on préfère à nouveau regarder ailleurs. La Suisse n’a pas encore tiré toutes les leçons de la pandémie, même si elle y travaille notamment grâce au programme de recherche «Covid-19 et société» du Fonds national suisse.
Mais veut-on seulement les tirer? Des questions fondamentales, qui ont suscité de la méfiance, voire de la défiance – comme celle de l’utilité scientifique du certificat covid –, ne sont plus abordées. Et le brouhaha permanent autour de cette maladie a épuisé les gens. Entre informations fiables et désinformations crasses, beaucoup ne veulent plus soulever ce couvercle, préférant le laisser hermétiquement clos.
Une telle approche est dangereuse. En particulier en 2025. Avec le retour de Donald Trump à la tête des Etats-Unis, c’est un pays entier qui bascule dans l’inconnu sanitaire. En pleine épidémie de grippe aviaire H5N1 sur son sol, et le décès d’un homme début janvier, les agences gouvernementales de santé ont reçu l’ordre de suspendre toutes communications externes. Sans informations sur l’évolution de cette épidémie, qui donnera l’alerte? Le Covid-19 nous a appris une chose essentielle: quand il y a des données, il est très difficile de nier un phénomène. La science peut être questionnée et même critiquée, voire donner lieu à des débats acharnés. Mais comment appréhender l’obscurantisme?