Le romancier Joan-Lluis Lluis signe un conte philosophique envoûtant qui célèbre la liberté et le pouvoir des mots
Ils sont quatre à prendre la route, petite troupe en fuite. On est à l’aube du Ier siècle de notre ère, sous le règne d’Auguste, quelque part à la frontière de l’Empire romain. A leur tête, une jeune fille, Junil. Pour échapper à un prétendant menaçant, elle a inventé une ruse qui a mené à l’assassinat de son tyran de père. Elle est en danger de mort. Et depuis qu’elle sait qu’Ovide, le poète banni, vit à Tomis, au bord de la mer Noire, elle n’a qu’une obsession: rejoindre l’auteur de L’Art d’aimer, s’offrir à lui, vierge.
Les trois autres sont des esclaves. Ils ont entendu parler des Alains, un peuple qui ne connaît pas la servitude. Ils veulent atteindre ce pays, situé là-bas, à l’est et au sud, on ne sait pas trop. Lafas est un érudit. Consacré à Minerve, il a passé plus de vingt ans, reclus dans la bibliothèque. Le vieux copiste Trident travaillait pour le père de Junil, libraire et auteur plagiaire. Le troisième, Dirmini, est un gladiateur sur le retour. Il sait manier les armes. Les fugitifs peuvent avoir besoin de lui. Ils viennent de l’univers des livres, ils connaissent la censure, la menace que peuvent receler les mots, mais ils savent peu des dangers du monde réel: les soldats de l’Empire, les barbares, les bêtes sauvages, le froid, la faim.
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