ÉDITORIAL. La disparition du leader emblématique de l’extrême droite française ne doit pas occulter, malgré un contexte politique international préoccupant, ce que l’homme était et devra demeurer pour toujours: un dangereux extrémiste

Jean-Marie Le Pen était fasciste, raciste, nostalgique de beaucoup de choses. Après avoir milité après-guerre dans des groupuscules d’extrême droite, c’est sur un tel terreau qu’il a cofondé en 1972, puis dirigé le Front national. Il a été accusé d’avoir pratiqué la torture lors de son engagement militaire en Algérie. Il a tenu ouvertement, réitéré parfois, des propos scandaleux (chambres à gaz «détail de l’Histoire»).

Voilà qui était l’homme décédé ce 7 janvier 2025 à 96 ans. Voilà ce qu’il faut avoir en tête lors d’un exercice post mortem que sa personnalité et son parcours rendent hors du commun, au sens premier du terme. Il y a des figures controversées chez qui, à l’heure des hommages funèbres, on trouve toujours matière à relativiser les défauts voire à redorer le blason. Est-ce le cas ici?

Nécrologie: Mort de Jean-Marie Le Pen, père honteux de l’extrême droite française

Le Breton a indéniablement marqué la politique française. Et réussi en 40 ans à faire de son parti une pièce importante sur l’échiquier politique français, fût-elle à l’extrême. A plusieurs reprises élu parlementaire (la première fois sous la IVe République), il a accédé au second tour de l’élection présidentielle en 2002. Ce sont des faits que les sentiments inspirés par le personnage ne peuvent occulter.

Mais c’était Jean-Marie Le Pen. Sa fille Marine c’est autre chose, qu’on l’apprécie ou pas. Son parti, qui avait fini en 2015 par tuer le père et se rebaptiser en Rassemblement national, c’est aussi autre chose, qu’on vote pour lui ou pas. Qu’on exècre la femme et sa formation politique ou pas.

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En ce début 2025, le RN n’a jamais été aussi proche du pouvoir, dans une France en perpétuelle crise politique où il peut n’importe quand contribuer à la censure du gouvernement de François Bayrou comme il l’a fait pour celui de Michel Barnier. Dans quelques jours, Donald Trump sera réintronisé président des Etats-Unis. En Autriche, le parti d’extrême droite FPÖ est chargé de former un gouvernement. En Italie, Giorgia Meloni gouverne. En Allemagne, une percée de l’AfD est attendue aux législatives de février.

C’est une ambiance, préoccupante voire effrayante à certains égards, mais ne tirons aucun symbole de ces contextes très différents les uns des autres. Jean-Marie Le Pen est et devra rester un inadmissible extrémiste dans les mémoires. Point. La seule chose peut-être est qu’avec la disparition de ce patriarche renié, on se demande dans quelle mesure sa fille politique (les sentiments d’une femme ayant perdu son père lui appartiennent) et le RN éprouvent une forme de soulagement.

En images: En images – Jean-Marie Le Pen, bâtisseur de l’extrême droite moderne française