ÉDITORIAL. Le Tribunal fédéral rejette les recours contre la votation sur le financement additionnel de l’AVS et la réforme AVS 21. Et c’est tout le système démocratique et politique suisse qui peut lui dire merci
Le Tribunal fédéral a tranché: il refuse d’invalider la votation sur la stabilisation de l’AVS, approuvée par le peuple le 25 septembre 2022. Les prévisions erronées des finances de l’assurance vieillesse n’ont pas pesé lourd face à la sécurité du droit. Les femmes qui espéraient encore arrêter de travailler à 64 ans doivent déchanter; les Suisses ne retourneront pas aux urnes et la mise en œuvre de la réforme se poursuivra sans retard ni accroc.
La déception des recourantes est compréhensible, tant l’écart entre partisans et opposants lors du scrutin était ténu, et les fronts nombreux: gauche contre droite, latins contre Alémaniques, femmes contre hommes, baby-boomers contre jeunes.
Mais au final, la lucidité des juges fédéraux préserve nos institutions de conséquences fâcheuses. Citoyennes et citoyens s’évitent une grosse crise de confiance démocratique. Cette année, le processus a déjà été mis à mal par la triste affaire des signatures falsifiées, et le manque de réaction gouvernementale n’a toujours pas réussi à rassurer. Ajoutée à cela, l’invalidation d’un scrutin aussi important que celui d’AVS 21 aurait autorisé la population à douter de tout ou presque, de la crédibilité gouvernementale comme de l’utilité d’aller voter.
C’est donc peu dire que le soulagement institutionnel est immense. Car une invalidation aurait ouvert une période d’incertitude politique et financière comme la Suisse en a peu connu dans l’histoire récente. Elle aurait détricoté tout le travail de consolidation de l’assurance sociale préférée des Suisses. Elle aurait tiré la prise d’une réforme dont certains éléments sont déjà intégrés dans la vie des entreprises comme dans le plan de carrière des employés, tels que la retraite flexible ou la retraite partielle. Elle aurait provoqué un effet domino au potentiel de crise nationale, puisque d’autres votations récentes auraient pu être remises en cause. Après le oui à la 13e rente AVS et le refus de la réforme de la prévoyance professionnelle, et en marge du vaste plan d’économies de la Confédération, la situation financière serait devenue quasi inextricable.
Pour autant, la sécurité du droit n’excuse pas tout. Les autorités doivent prendre l’épisode de ces recours comme un très sérieux avertissement. Avec la multiplication des initiatives et des référendums, l’enjeu est énorme. Au Conseil fédéral de serrer la vis de ses ouailles, Chancellerie et administration, pour que les explications précédant les votations soient moins exhaustives mais mieux consolidées.
En Suisse, il n’y a actuellement pas de pire menace que celle mettant en danger la stabilité intérieure et les fondements de la démocratie de la Suisse. En cela, la décision du Tribunal fédéral est une bonne nouvelle.