Après avoir connu une crise en 2023, le groupe bâlois a annoncé une réorganisation de ses activités et l’abandon de sa division Capsules & Health en amont de sa journée des investisseurs. Lonza a aussi confirmé ses projections pour l’ensemble de l’année 2024
Il y a un peu plus d’un an, Lonza traversait une crise. En deux jours, la pharma bâloise avait perdu son directeur Pierre-Alain Ruffieux, en poste depuis novembre 2020, et la production de substance médicamenteuses pour Moderna. Son président de l’époque Albert Baehny avait alors pris la direction générale par intérim, avant d’annoncer lui-même son départ pour le mois de mai 2024. En avril, le spécialiste de la sous-traitance pharmaceutique avait annoncé l’arrivée de Wolfgang Wienand, alors à la tête de son concurrent Sigfried, au poste directeur général. Jean-Marc Huët a lui remplacé Albert Baehny à la présidence du conseil d’administration.
Après les changements à sa tête, Lonza s’apprête désormais à connaître une autre transformation. La nouvelle direction souhaite entamer une réorganisation des activités de l’entreprise pour se concentrer sur son cœur de métier, la sous-traitance pharmaceutique (CDMO). Une mue qui implique l’abandon de sa division Capsules & Health Ingredients (CHI) comme elle l’a annoncé ce jeudi matin, en amont de sa journée des investisseurs.
Toutefois l’entreprise n’a pas donné de date précise à laquelle cette scission devait intervenir, ni de détail sur la manière dont elle comptait se retirer de ces activités. Dans un communiqué, Lonza indique qu’elle aura lieu «au moment opportun» et «dans le meilleur intérêt des actionnaires et des parties prenantes». Lors d’une conférence de presse téléphonique, la direction a évoqué une phase de transition d’un à deux ans.
«Nous ne sommes pas pressés par le temps», a déclaré le directeur financier (CFO) de Lonza, Philippe Deecke, lors de cette conférence. La division CHI, qui représentait 17% du chiffre d’affaires du groupe sur l’exercice 2023, était une «solide génératrice de liquidités», a-t-il reconnu. «Mais même sans cette division, les flux de trésorerie de Lonza continueront de croître», assure Philippe Deecke.
En 2023 cependant les ventes de ce département avaient enregistré un recul de -8,3%. Au premier semestre 2024, cette baisse était de -9,2% par rapport à la même période en 2023. Une tendance qui semblait s’inscrire dans la durée puisque lors de la présentation de ses résultats du troisième trimestre elle indiquait que ses activités CHI avaient enregistré une performance plus faible, mais en ligne avec le marché, «en raison de la poursuite du déstockage des capsules pharmaceutiques». «Nous prévoyons que l’activité CHI reviendra progressivement aux niveaux de marge antérieurs et connaîtra une croissance faible à un chiffre à taux de change constant», précise cependant Philippe Deecke.
La réorganisation des activités du groupe bâlois doit aller plus loin que l’abandon de cette division. «Nous sommes face à une organisation complexe assez cloisonnée où nous pouvons clairement nous améliorer. Nous le faisons continuellement et nous avons étendu notre réseau mondial de fabrication à grande échelle, mais nous voyons encore des possibilités de faire mieux en ce qui concerne l’ingénierie des usines et l’efficacité opérationnelle», estime Wolfgang Wienand.
Lonza a donc également présenté une nouvelle stratégie intitulée «One Lonza» qui doit passer par une nouvelle structure organisationnelle. Trois «plateformes commerciales» viendront remplacer les quatre divisions actuelles. «La nouvelle configuration devrait être achevée au deuxième trimestre 2025», a indiqué Philippe Deecke. Dans le même temps, Lonza affirme vouloir devenir plus active sur le front des acquisitions complémentaires, qui devraient gagner en importance.
Du côté des analystes financiers l’annonce semble convaincre. «Lonza est en train de céder ses activités dans le domaine des capsules, ce qui est positif, car elles ne sont pas essentielles, souligne une note de la banque Vontobel. Dans l’ensemble, la nouvelle structure et la nouvelle stratégie sont positives. À long terme, nous voyons Lonza comme un bénéficiaire de l’externalisation de la production de nouveaux médicaments par les sociétés pharmaceutiques, du near-shoring [stratégie d’externalisation des activités commerciales et de production dans des pays proches géographiquement, ndlr] et des tendances démographiques.»
Pour sa part, Thomas Hodges, spécialiste des investissements pour la société de gestion de placements écossaise Baillie Gifford souligne également le bon positionnement de Lonza dans le marché en pleine croissance de l'externalisation de la fabrication de médicaments: «Sa décision de se retirer du segment des gélules et des ingrédients de santé lui permettra de se concentrer encore davantage sur son activité CDMO qui, selon nous, est au cœur des perspectives de croissance à long terme de l'entreprise. Nous pensons que les vents contraires cycliques se transforment en vents favorables pour Lonza et que la croissance devrait s'accélérer à nouveau, à mesure que les problèmes qui ont affecté l'industrie au cours des deux dernières années disparaîtront.»
«Nous saluons le projet de se séparer de cette division, en faible croissance. La décision ne nous surprend pas. En revanche, nous sommes surpris par le timing précoce» commente pour sa part l’analyste Daniel Jelovcan de la Banque cantonale de Zurich (ZKB). A la bourse suisse la réaction a également été positive puisque le titre de Lonza était en hausse de 4,4% en fin de journée à environ 545 francs.
Le groupe bâlois a également confirmé ses prévisions pour l’ensemble de 2024. Les ventes devraient connaître une évolution stable et la marge opérationnelle bénéficiaire (Ebitda) devrait être de l’ordre de 27 à 29%.
Pour 2025, les ventes devraient croître de 20%. L’acquisition du site de Vacaville, aux Etats-Unis, devrait contribuer au chiffre d’affaires à hauteur d’environ un demi-milliard de francs. La marge Ebitda approchera les 30%.
Pour la période après 2025, Lonza prévoit une progression des ventes de 15% et de l’Ebitda supérieure à la croissance du chiffre d’affaires. Les prévisions sont conformes aux précédentes perspectives à moyen terme pour 2028, précise encore la société.
Lonza a par ailleurs également confirmé sa politique de dividendes. Le groupe bâlois s’est engagé à maintenir ou à augmenter le dividende par action d’une année à l’autre, à un taux de distribution compris entre 35 et 45%.