CHRONIQUE. Les mauvais résultats de la COP29 ont beau s’expliquer logiquement, le défaut des pays contributeurs va terriblement pénaliser les pays qui ne peuvent que compter sur eux, écrit David Hiler

Le bras de fer qui a eu lieu à Bakou pendant la COP29 est très inquiétant. D’un côté, les pays en voie de développement, se fondant sur les rapports d’experts, exigeaient 1000 milliards de dollars par année; de l’autre, les pays contributeurs (principalement les Etats-Unis, l’Europe, les pays du Golfe et les tigres asiatiques) n’ont offert que 300 milliards. Cela semble énorme mais, pour donner un ordre de grandeur, le PIB de l’Union européenne dépasse à lui seul les 18 000 milliards de dollars.

Pourquoi les grandes économies que sont les USA et l’UE ont-elles fixé ce plafond? Pour faire simple, on dira qu’il y a les pays qui ne veulent pas et les pays qui ne peuvent pas payer plus.

Ceux qui ne veulent pas et ceux qui ne peuvent pas

Ceux qui ne veulent pas, ce sont évidemment les monarchies du Golfe et les Etats-Unis. Ces derniers s’apprêtent quoi qu’il en soit à se retirer de l’Accord de Paris. Même s’ils décidaient finalement d’y rester, le «Make America Great Again» se traduira par une réduction de leurs dépenses en faveur de l’étranger. Les USA vont définitivement renoncer à jouer les gendarmes du monde (c’est plutôt une bonne nouvelle). Et ils vont réduire leur financement aux organisations internationales et leur soutien aux pays en voie de développement.

Ceux qui ne peuvent pas, ce sont tous les autres en fait, tétanisés par la perspective de la fin de la contribution étasunienne. Les Européens, en particulier, traversent une mauvaise passe. Le rapport Draghi a pointé les fragilités structurelles de l’économie du Vieux-Continent et notamment sa dépendance technologique vis-à-vis des Etats-Unis et de la Chine ainsi que son retard dans la transition numérique et écologique.

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La locomotive allemande a été sérieusement mise à mal par les conséquences de l’agression russe contre Ukraine. Son modèle économique basé sur le gaz à bon marché et des industries exportatrices est remis en cause par la montée du protectionnisme américain. Plusieurs pays de l’UE sont en outre confrontés à un problème de compétitivité. L’endettement réduit la capacité financière des Etats et le vieillissement de la population impose de nouvelles charges pour les retraites et la santé. L’augmentation des dépenses militaires est inévitable pour se prémunir contre les velléités d’expansion de Poutine et donner satisfaction à Donald Trump. Globalement, l’Union européenne connaît une phase de croissance atone qui risque de durer.

Le cas chinois

Dans ces conditions, on comprend pourquoi les pays contributeurs, au sens de l’Accord de Paris, ont demandé aux pays émergents de participer au financement. La Chine est évidemment dans le viseur. N’est-elle pas la deuxième économie mondiale et le plus grand émetteur de CO2? Or la Chine veut bien participer mais refuse d’y être contrainte parce qu’elle se considère encore comme un pays en voie de développement. Elle estime aussi que les pays occidentaux sont historiquement responsables du changement climatique du fait de leur industrialisation précoce. Enfin, elle refuse par principe de se soumettre à des normes internationales imposées par les pays occidentaux.

Ces arguments ne peuvent pas être écartés d’un revers de main. Certes, la Chine est en passe de devenir la première économie du monde mais son PIB par habitant est 6 fois inférieur à celui des Etats-Unis et 3 fois inférieur à celui de l’UE.

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Bref, c’est mal parti pour les pays en voie de développement qui émettent peu de CO2 mais sont ceux qui vont souffrir le plus du réchauffement climatique. Pour les investissements dans les énergies renouvelables et tout ce qui va avec (les batteries, le réseau intelligent, etc.), les capitaux privés suffiront sans doute puisqu’il s’agit d’investissements rentables. En revanche, pour les dépenses d’adaptation au dérèglement climatique ou la compensation des dégâts occasionnés par les événements météorologiques extrêmes, la situation risque d’être dramatique dans une bonne partie du monde.


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