Toutes les activités politiques ont été interdites et les médias sont placés sous la surveillance du gouvernement. Yoon Suk Yeol compte lutter contre le parti d’opposition, qu’il accuse de vouloir «renverser l’ordre démocratique»
Le président sud-coréen Yoon Suk Yeol a proclamé mardi la loi martiale, dans un contexte de débat parlementaire houleux sur le budget, une décision jugée «illégale» par le chef de l’opposition qui a appelé la population à manifester.
«Pour protéger la Corée du Sud libérale des menaces posées par les forces communistes nord-coréennes et éliminer les éléments hostiles à l’Etat (…), je déclare la loi martiale d’urgence», a déclaré le président en direct dans une allocution télévisée surprise. «Sans se soucier des moyens de subsistance du peuple, le parti d’opposition a paralysé le gouvernement, à des fins de destitutions, d’enquêtes spéciales et pour protéger son leader de poursuites judiciaires», a-t-il poursuivi.
Selon les informations des médias Sky News et The Korea Herald, l'assemblée nationale – dirigée par l'opposition – a déjà adopté une motion visant é révoquer la loi martiale, lors d'une session plénière urgente convoquée par le président de l'assemblée. 190 sur 300 députés étaient présents, précise le média britannique. D'après la loi coréenne, précise quant à lui The Korea Herald, le président est tenu de lever la déclaration si l'Assemblée nationale le demande après un vote à la majorité.
Assembly Speaker says martial law 'annulled' pic.twitter.com/VgCo2uBBob
— The Korea Herald 코리아헤럴드 (@TheKoreaHerald) December 3, 2024
Toutes les activités politiques ont été interdites et les médias sont placés sous la surveillance du gouvernement, a déclaré le chef de l’armée Park An-su dans un communiqué. Des hélicoptères ont atterri sur le toit du parlement à Séoul, d’après des images en direct diffusées par les chaînes de télévision.
Des centaines de personnes ont afflué mercredi matin devant le parlement en Corée du Sud pour protester contre l’imposition de la loi martiale, selon des images diffusées en direct à la télévision. «Ouvrez la porte, s’il vous plaît. Votre travail est de protéger l’Assemblée nationale. Pourquoi restez-vous les bras croisés pendant que des députés sont piétinés?», a crié un homme à un groupe de policiers gardant les portes du parlement, qui a été placé sous scellés. Les forces spéciales tentent d’entrer dans le parlement.
Le chef de l’opposition sud-coréenne, Lee Jae-myung a qualifié la loi martiale d'«illégale» et a appelé la population à se rassembler devant le parlement en signe de protestation. «L’imposition illégale de la loi martiale par le président Yoon Suk Yeol est invalide», a déclaré Lee Jae-myung, qui a perdu de justesse face à Yoon lors des élections de 2022. «Venez à l’Assemblée nationale maintenant. Je m’y rends également», a-t-il ajouté, exhortant les citoyens à se joindre à lui pour s’opposer à la loi martiale.
Les Etats-Unis ont déclaré «suivre la situation de près» en Corée du Sud, tandis que la Chine a appelé ses concitoyens en Corée du Sud à la «prudence».
Le Parti du Pouvoir au Peuple de Yoon Suk Yeol continue de batailler avec le principal parti d’opposition, le Parti Démocrate, sur le projet de budget de l’année prochaine. Les députés de l’opposition ont approuvé la semaine dernière, à travers une commission, un programme budgétaire considérablement réduit.
«Notre Assemblée nationale est devenue un refuge de criminels, un repaire de dictature législative qui cherche à paralyser les systèmes administratif et judiciaire et à renverser notre ordre démocratique libéral», a encore déclaré Yoon Suk Yeol.
Il a accusé les élus de l’opposition de couper «tous les budgets essentiels aux fonctions premières de la nation qui sont la lutte contre les crimes liés à la drogue et le maintien de la sécurité publique (…) transformant le pays en un paradis de la drogue et en un lieu de chaos pour la sécurité publique».
Yoon Suk Yeol a poursuivi en qualifiant l’opposition, qui détient une majorité au Parlement, de «forces hostiles à l’Etat ayant l’intention de renverser le régime». Il a assuré que sa décision était «inévitable». «Je rétablirai la normalité dans le pays en me débarrassant de ces forces hostiles à l’Etat dès que possible», a ajouté le président sud-coréen.
La Corée du Sud reste marquée par le soulèvement populaire de Gwangju du 18 mai 1980, qui protestait contre le coup d’Etat militaire du général Chun Doo-hwan et l’instauration de la loi martiale – mise en œuvre au prétexte de lutter contre la menace nord-coréenne. Les manifestations avaient été réprimées dans le sang par l’armée du dictateur.