CHRONIQUE. Ni «active», ni «coopérative», la neutralité est avant tout souple et pragmatique, rappelle François Nordmann, à propos du non du Conseil fédéral à l’initiative sur la neutralité, souhaitée par les souverainistes
Le Conseil fédéral a rejeté l’initiative qui veut restreindre la politique de neutralité de la Suisse, lancée par l’UDC et ses proches. Le gouvernement veut préserver la flexibilité qui caractérise sa pratique de la neutralité depuis les trente dernières années. Il n’entend pas se laisser entraîner à devoir mener une neutralité «active», comme l’aurait voulu l’ancienne conseillère fédérale Micheline Calmy-Rey au début des années 2000. Il a repoussé la notion de neutralité «coopérative» pour laquelle le conseiller fédéral Ignazio Cassis plaidait au début de la guerre d’agression contre l’Ukraine du haut de la tribune du WEF à Davos, sans l’avoir consulté préalablement. Il maintient ce cap aujourd’hui et refuse d’enfermer la neutralité dans des formules normatives qui limiteraient sa liberté de manœuvre. La neutralité est un instrument au service de la diplomatie et de la politique de sécurité.
Or l’initiative crée une idéologie de la neutralité, idéalisée et sacralisée, qui deviendrait un but en soi et qui s’opposerait aux nécessités de la défense du pays et à la conduite d’une politique étrangère responsable en temps de guerre. Elle interdirait la participation à des exercices communs avec des armées de pays partenaires, et s’opposerait généralement à toute coopération avec des alliances telles que l’OTAN ou l’UE. Elle nous empêcherait de prendre des sanctions économiques contre un agresseur en dehors de celles formellement décrétées par le Conseil de sécurité de l’ONU.
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