A une époque de fragmentation mondiale, la Suisse se trouve à un carrefour décisif. Notre position unique – située au croisement des cultures européennes et en tant qu'un des pôles de la finance durable mondiale – ne nous confère pas une prétention à un leadership unilatéral, mais plutôt une profonde responsabilité: celle de catalyser une action collective vers un avenir plus durable

Le monde se fracture, et trop de dirigeants prônent l’érection de murs, vendant l’illusion qu’ils peuvent protéger leurs citoyens de la polycrise mondiale en se repliant sur eux-mêmes. Les mouvements politiques s’enferment de plus en plus dans un nationalisme étroit, tandis que des défis mondiaux complexes – du changement climatique aux inégalités économiques – exigent des solutions collaboratives et novatrices. La force de la Suisse a toujours résidé dans sa capacité à rassembler, à écouter, et à créer des plateformes où des perspectives diverses peuvent trouver un terrain d’entente.

L’initiative Building Bridges incarne cet esprit. Il ne s’agit pas pour la Suisse de résoudre seule les problèmes mondiaux, mais de créer un espace inclusif où des parties prenantes essentielles – institutions financières, entreprises, gouvernements, société civile et experts académiques – peuvent développer des approches concrètes pour relever nos défis les plus urgents.

Notre rassemblement de 2023 a été un témoignage de cette approche, réunissant 2500 participants de 110 pays. En 2024, notre monde exige des changements urgents qui passent du dialogue à l’action, de l’identification des problèmes à la mise en œuvre de solutions concrètes.

Le rassemblement de 2023 a réuni 2500 participants de 110 pays. — © Antoine Tardy / © Building Bridges/Antoine Tardy
Le rassemblement de 2023 a réuni 2500 participants de 110 pays. — © Antoine Tardy / © Building Bridges/Antoine Tardy

Le paysage géopolitique devient de plus en plus complexe. Les conflits en cours au Soudan, en Ukraine et à Gaza, combinés à une élection américaine controversée, des guerres commerciales imminentes et une opposition persistante aux investissements ESG soulignent la nécessité d’une approche robuste et adaptable pour la finance durable.

La conférence Building Bridges de cette année (du 9 au 12 décembre à Genève) mettra l’accent sur des stratégies pratiques et réalisables. Nous réunirons des leaders d’opinion qui ne sont pas seulement des théoriciens, mais des praticiens transformant leurs domaines. Johan Rockström, éminent climatologue ayant cartographié les limites planétaires, et Sir Ronald Cohen, inventeur de la finance sociale, redéfinissent la manière dont nous envisageons l’impact plus large des investissements.

Nos intervenants et participants représentent une mosaïque mondiale d’acteurs du changement. James Mwangi, qui a transformé Equity Group, une petite structure, en la plus grande banque du Kenya et maintenant d’Afrique de l’Est, incarne le potentiel de l’innovation financière pour favoriser le progrès social. Mary Robinson, ancienne présidente de l’Irlande et présidente des Elders, apporte des décennies d’expérience en plaidoyer pour la justice climatique et les droits humains. Ces dirigeants du secteur financier et politique partageront l’espace avec des activistes climatiques exigeant une action rapide face à l’urgence climatique, comme Xiye Bastida, militante mexicaine pour le climat.

Mais il ne s’agit pas de figures individuelles célèbres. Il s’agit d’une communauté. Plus de 120 organisations participent à notre événement, avec plus de 70 sessions conçues de manière collaborative qui reflètent des perspectives locales et des innovations de terrain. La Solutions Stage mettra en lumière des exemples concrets montrant comment la finance durable peut améliorer tangiblement les sociétés.

Depuis sa création en 2019, Building Bridges est bien plus qu’une conférence. C’est une plateforme pour des initiatives critiques. Nous avons soutenu le lancement de la SDG Impact Finance Initiative, qui vise à mobiliser des investissements privés pour atteindre les objectifs de développement durable. Nous avons également accueilli le lancement de la Taskforce on Nature-related Financial Disclosures, qui pousse à une transparence accrue dans la prise en compte des risques environnementaux par les institutions financières.

Le modèle financier actuel, centré uniquement sur le profit à court terme, est fondamentalement défaillant. Il épuise les ressources naturelles, exacerbe les inégalités et menace la stabilité économique à long terme. Nous avons besoin d’un nouveau paradigme qui valorise à la fois les écosystèmes naturels et le potentiel humain.

En prenant les devants dans le domaine de la finance durable, la Suisse peut se positionner à l’avant-garde d’une transformation économique mondiale. Il ne s’agit pas de revendiquer une supériorité, mais de proposer une voie collaborative. Cette transition représente une opportunité économique pour la Suisse en tant que hub financier mondial: les institutions financières suisses, les décideurs politiques et les citoyens doivent l’adopter, non seulement par altruisme, mais parce que notre sécurité et notre prospérité collectives dépendent de notre capacité à régénérer un monde en crise.

Nous ne construisons pas des murs. Nous construisons des ponts, des ponts qui relient des perspectives différentes, qui unissent considérations économiques et environnementales, et qui, en fin de compte, connectent nos actions présentes à un avenir plus résilient.

Le travail commence maintenant. Ensemble.


Visitez www.buildingbridges.org pour plus d’informations.