ÉDITORIAL. En annonçant d’importantes hausses de tarifs douaniers dès le début de son mandat, le président élu met à exécution ses promesses électorales, sans foi ni loi. On voit mal qui pourrait réellement en profiter

La mondialisation n’a plus la cote. Elle a augmenté les inégalités dans le monde et partiellement causé le réchauffement de la planète. Ce n’est qu’une fraction de l’image, mais c’est sur celle-là que Donald Trump a surfé lors de sa campagne, promettant, selon son expression préférée, de rendre sa grandeur à l’Amérique en la barricadant derrière ses frontières. Des murs, de nouvelles lois ou des tarifs douaniers. Méthode simple, associée à la promesse tout aussi basique que tous les problèmes ou presque sont importés. Et que réduire ces importations conduira à résoudre les problèmes.

Les annonces de hausses de droits de douane sur les produits en provenance de Chine, du Canada et du Mexique s’inscrivent parfaitement dans le scénario. Donald Trump a confirmé lundi sur son réseau social qu’elles seraient ses premières mesures économiques dès son investiture en janvier prochain, malgré l’accord commercial que son pays a signé avec le Canada et le Mexique. Avec la forme, à savoir des majuscules, des points d’exclamation et une sombre allusion au fait que la Chine devrait tenir sa parole de punir sévèrement les «trafiquants», «jusqu’à la peine de mort».

Car l’utilisation de cet argument – la crise des opiacés aux Etats-Unis – pour justifier les hausses tarifaires lui servira à invoquer des raisons de sécurité nationale pour déroger aux règles fixées par l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Il avait déjà usé de la méthode pour justifier des taxes sur l’acier et l’aluminium européens lors de son premier mandat. L’OMC avait conclu à la violation de ses règles par les Etats-Unis, sans effet direct. Pourquoi ne pas recommencer?

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Menacer, puis négocier

Les tarifs douaniers plus élevés seront payés par les Américains, entreprises et consommateurs finaux, générant de l’inflation et une baisse de la consommation malgré d’éventuelles relocalisations. L’effet sera également négatif sur le plan mondial, induisant rétorsions commerciales, hausses de prix, pression sur la croissance et l’emploi, sans parler de l’imprévisibilité pour tous les acteurs économiques. Mardi, les bourses ont d’ailleurs réagi à la baisse en Europe, même si elle n’est pas visée à ce jour. Pourquoi ne le serait-elle pas? Les constructeurs automobiles sont déjà touchés par le biais de leur production mexicaine ou canadienne.

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La mondialisation a augmenté la richesse globale, sorti des centaines de millions de personnes de la pauvreté en améliorant leur santé et leur accès à l’éducation. C’est ce que les faits démontrent. Le commerce mondial doit être encadré par des règles et une gouvernance multilatérales, voulues par les Etats souverains, constamment adaptées. Croire que le protectionnisme sans foi ni loi sera la solution est une erreur.

Donald Trump commence par des menaces pour mieux négocier. A l’évidence, il ne respecte pas plus l’OMC que les autres organisations ou accords internationaux. Dans tous les cas, c’est le monde auquel il faut se préparer. Donald Trump, saison 2: lancement le 20 janvier 2025.