Rouge depuis près de 50 ans, la mairie de Bienne reste socialiste grâce à Glenda Gonzalez Bassi, qui a battu sa rivale Natasha Pittet sur le fil

Il n’y a pas eu de surprise lors de l’élection à la mairie de Bienne, mais on n’en est pas passé loin. Favorite, la socialiste Glenda Gonzalez Bassi s’est imposée en recueillant 5’848 voix, contre 5’640 à la radicale Natasha Pittet, qui a donc réduit l’écart de moitié par rapport au premier tour. Plus qu’une victoire pour la gauche, c’est un succès pour les femmes - une première historique même - et pour les francophones.

Quel parcours pour Glenda Gonzalez Bassi, fille d’un réfugié chilien! C’est sous la neige qu’elle avait découvert la Suisse en janvier 1974, à l’âge de six ans. Un demi-siècle plus tard, la voici au sommet de sa carrière politique, dans un décor tout aussi enneigé. «J’ai pensé à mon père plutôt qu’à moi», confie-t-elle, un gros bouquet de roses à la main. Durant ces 50 ans, elle enchaîne formation universitaire, profession, famille et politique. Depuis quatre ans, elle siège au Conseil municipal, à la tête de la Direction de la formation, de la culture et du sport. A son bilan, la construction d’une halle multisports aux Champs de Boujean et un projet d’économie circulaire pour les écoles et les crèches de la ville, soit 1800 repas concoctés avec des produits locaux et de saison.

Un portrait: Glenda Gonzalez Bassi: née au Chili, municipale à Bienne

Soulagement à gauche

Pour la gauche cependant, cette élection n’a rien d’un plébiscite. Si le résultat a été accueilli par des acclamations au Centre de communication à la place Robert-Walser, celles-ci ont davantage trahi un soulagement qu’une joie débordante. Pour ce qui est des votations fédérales, Bienne la rouge a été fidèle à sa réputation: sa population a dit quatre fois non, aussi bien à l’extension du réseau autoroutier (à 68%) qu’au nouveau financement du système de santé (à 59%). Mais elle n’a élu Glenda Gonzalez Bassi qu’à une majorité de 50,9%. Le nombre de bulletins blancs (269) a même dépassé la différence de voix entre les deux rivales. Perçue comme trop «arrogante» et «dogmatique», la nouvelle maire n’a pas réussi à lever tous les doutes à ce propos. «Ces nombreux bulletins blancs sont un désaveu pour la nouvelle maire, qui ne faisait pas l’unanimité même dans son camp», commente le conseiller de ville du parti radical alémanique, Andreas Suter.

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A droite, Natasha Pittet ne cachait pas sa déception, mais elle a été tout près de créer la sensation en échouant à 1% de la majorité. «J’ai réussi ma campagne. J’ai clairement récolté des voix en dehors du sérail du centre-droit. Cette année, celui-ci avait formé une alliance allant du mouvement centriste Avenir Bienne à l’UDC. Ce dimanche, tout le monde en convenait: «Cette alliance a bien fonctionné», s’est réjoui Pierre-Yves Grivel, le chef de campagne de la candidature de droite.

Cela n’était pas évident, car l’exercice tenait du grand écart permanent pour Natasha Pittet. Cette dernière devait à la fois rassurer l’UDC tout en séduisant le centre-gauche en affichant son soutien à la culture et à une politique financière moins stricte que celle de la droite dure. Le 5 novembre, Natasha Pittet a participé à l’assemblée de l’UDC organisée dans les locaux de l’entreprise de son président Patrick Widmer. «Cela s’est bien passé», déclare ce dernier. Mais cela n’a pas suffi. «Il n’a manqué qu’un peu d’expérience politique au Conseil municipal», suppose Andreas Suter. Natasha Pittet n’y siège que depuis un an et demi.

Un autre portrait: Natasha Pittet avait dit non, mais elle sera municipale à Bienne

Bienne la romande

Le succès de Glenda Gonzalez Bassi est surtout une victoire pour les femmes. «Enfin une femme à la tête de la dixième ville de Suisse», se réjouit la future maire. «A l’administration, je vais travailler à faciliter la conciliation entre vies professionnelle et privée pour les femmes par exemple en promouvant le job sharing», annonce-t-elle. Elle se félicite aussi de ce que l’écart salarial entre hommes et femmes se soit réduit de 4,5% à 2% ces dernières années.

Son élection est aussi une très bonne nouvelle pour les francophones - 43% de la population -, qui gagneront en crédit et en influence. Outre une nouvelle maire, la cité horlogère aura également un chancelier romand, en la personne de Julien Steiner. «De quoi rappeler à toute la Suisse que Bienne est aussi une ville romande», a résumé Natasha Pittet.