Le Parlement du sport suisse a désigné l’ancienne conseillère fédérale pour succéder à Jürg Stahl, qui est resté huit ans à la tête de l'instance. Ses membres ont une nouvelle fois renoncé à privilégier une personnalité issue du sérail
L'ancienne conseillère fédérale Ruth Metzler a réussi son pari. L'Appenzelloise de 60 ans a été élue présidente de Swiss Olympic par les délégués des 36 fédérations sportives olympiques, 47 fédérations sportives non olympiques, 30 organisations partenaires et 23 personnes physiques qui composent le Parlement du sport suisse. Vendredi à Ittigen, près de Berne, elle a été préférée à Markus Wolf, un Grison de 51 ans issu du secteur sportif.
Une nouvelle fois, le sport suisse a choisi de se ranger derrière une personnalité politique - même si celle-ci a insisté durant sa campagne sur les trente ans de sa vie qu'elle a consacrés à l'économie privée. Ruth Metzler succède à Jürg Stahl, qui était conseiller national au moment de son élection en 2016. Auparavant, Swiss Olympic avait été présidé par l'ancien conseiller d'Etat bâlois Jörg Schild et, encore plus tôt, par l'ancien conseiller d'Etat saint-gallois Walter Kägi.
Mais cette année, le scrutin était annoncé serré. A l’instar de la commission des athlètes de Swiss Olympic, mais aussi des fédérations nationales de ski, de hockey ou de cyclisme, certaines instances caressaient le rêve d’un changement de paradigme. D’un leadership plus au fait des enjeux du terrain. C’est sur cette tendance que Markus Wolf a capitalisé durant sa campagne, mettant en avant ses expériences comme joueur et entraîneur international d’unihockey, directeur de fédération, haut fonctionnaire de l’Office fédéral du sport, patron d’organisation active dans le tourisme hivernal. «Pour moi, la première qualité d’un président doit être la connaissance fine de son secteur d’activité», martelait-il, conscient que Ruth Metzler ne pouvait pas rivaliser sur ce terrain.
Dans une élection à bulletin (électronique) secret, elle a pourtant réuni 329 suffrages contre 162 à son adversaire et quatre abstentions. Après quelques cris de joie, le président sortant Jürg Stahl l'a invitée à monter à la tribune pour, a-t-il précisé, taquin, annoncer «si elle acceptait l'élection». Eclat de rire général à défaut de suspense: oui, l'ancienne conseillère fédérale a accepté, remerciant au passage l'assemblée pour sa confiance. Elle restera comme la première femme à avoir été élue à la tête de Swiss Olympic.
Cela faisait près de quatre heures que le Parlement du sport était réuni et la salle Stadion de la Maison du Sport, à Ittigen, près de Berne, avait fait le plein. Les délégués des fédérations sportives et associations partenaires, assis au coude à coude, avaient respecté une minute de silence en mémoire de la jeune cycliste Muriel Furrer et de l'ancien président de Swiss Olympic Walter Kägi, décédés cette année; accepté un budget 2025 déficitaire à hauteur de 980 000 francs environ (sur 125 millions de charges); adoubé de nouveaux membres; exclu la Fédération suisse de sport-boules, plus en conformité avec les exigences. Mais c'est pour le point 12.1 de l'ordre du jour, l'élection présidentielle, qu'ils étaient «particulièrement nombreux» (selon un employé de l'instance) à avoir fait le déplacement cette année.
Il y a fort à parier que la plupart des délégués connaissaient déjà leur vote en arrivant vendredi à Ittigen. Mais les deux candidats disposaient tout de même de dix minutes de temps de parole chacun pour convaincre les derniers indécis. Leurs discours successifs ont confirmé qu’il s’agissait bien d’un match de profils, et pas d’idées. Sur le fond, difficile de trouver la moindre dissonance entre Ruth Metzler et Markus Wolf. Tous les deux voulaient assurer les financements du sport dans un contexte de restriction budgétaire fédérale, faire perdurer les bons résultats internationaux des athlètes suisses, organiser des grands événements et permettre au pays d’en tirer profit, etc.
Les approches de l’une et de l’autre, en revanche, se sont révélées antagonistes. Ruth Metzler a mis l’accent sur ses compétences politiques au niveau cantonal et fédéral, mais aussi sa longue expérience dans le domaine de l’économie privée. Elle a promis de renoncer à «plusieurs» de ses mandats professionnels actuels pour «prioriser» Swiss Olympic dans son emploi du temps, tout en mettant en avant ses «contacts personnels» dans l’administration fédérale. Son manque de connaissance du secteur? «J’ai l’habitude de travailler avec des gens plus compétents que moi dans certains domaines», a-t-elle asséné. La salve d’applaudissements qu’elle reçut en retour témoignait déjà de l'avantage que le scrutin allait mettre au jour.
Dans la foulée, Markus Wolf mit l’accent sur son vécu, ses souvenirs sportifs, ses accomplissements dans l’encouragement de la pratique dans son canton des Grisons. Plusieurs de ses soutiens prirent ensuite la parole pour appuyer sa candidature, mais les jeux étaient faits, et bien faits. Avant même le début des débats du Parlement du sport, plusieurs délégués faisaient part au Temps de «l'évidence» de choisir Ruth Metzler. «La présidence de Swiss Olympic est un poste éminemment politique, et son vécu en la matière est inestimable», nous glissait Dominique Blanc, président de l'Association suisse de football. D'autres voix saluaient la qualité du profil de Markus Wolf, tout en l'estimant plus adapté à un rôle de direction opérationnelle.