Documentaire saisissant, «Black Box Diaries» se présente comme le journal intime filmé de Shiori Ito, jeune journaliste qui lança le mouvement #MeToo au Japon suite à son viol
Sensation du dernier Zurich Film Festival, où il fut sacré meilleur documentaire et remporta le Prix du public, Black Box Diaries ne doit surtout pas rester un film de festivals. Comme Citizen Four de Laura Poitras il y a 10 ans (sur l’affaire Edward Snowden et la révélation des surveillances illégales de la NSA), c’est en effet un film qui donne l’impression de capter un changement majeur en direct, en l’occurrence le mouvement #MeToo. Trop tard? Sauf qu’il manquait justement ce témoignage-là, réalisé par une victime elle-même, dont le combat coïncida avec la levée de boucliers mondiale suscitée par l’affaire Weinstein. Et qu’il nous vienne du Japon, puissant bastion patriarcal, ne le rend que plus fort.
A 23 ans, comme toute jeune journaliste, Shiori Ito se voyait plutôt partie pour documenter le monde et les autres. Mais le 4 avril 2015, à la suite d’un entretien d’embauche, sa vie bascula et elle devint son principal sujet – pour toutes les autres. Malgré un black-out mémoriel, elle acquit en effet la conviction d’avoir été violée cette nuit-là dans une chambre d’hôtel par Noriyuki Yamaguchi, un éminent collègue plus âgé, par ailleurs biographe et proche du premier ministre Shinzo Abe. D’ordinaire, dans ces cas-là, une jeune femme se tait: aucune chance d’être entendue. Sauf qu’en tant que chercheuse de vérité professionnelle, elle porta plainte et se mit à filmer. Huit ans d’enquêtes, de blocages, de procédures judiciaires, de découragement et d’agitation médiatique plus tard, l’affaire n’est toujours pas jugée sur le fond. Mais son combat a fait de Shiori Ito la figure de proue du mouvement #MeToo au Japon, contre un patriarcat qui nie en bloc.
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