Ana Isabel Gongola, 39 ans, est mère de deux jumeaux, Lukas et Matheo, 15 ans, tous les deux en situation de handicap (leur pathologie est encore à ce jour inconnue), et en fauteuil roulant. D’origine portugaise, Ana s’est installée en France avec ses deux enfants et son époux lorsque celui-ci a reçu une proposition d’emploi dans le pays.

Récemment, la famille a déménagé de Créteil à Esclavolles-Lurey dans la Marne, pensant pouvoir se rendre occasionnellement en train à Paris (où les enfants sont suivis par des médecins), depuis la gare de Romilly-sur-Seine.

Mais la ville est-elle accessible pour elle et ses deux enfants ? Nous avons fait le test au cours d’une balade dans le centre-ville incluant plusieurs lieux publics utiles au quotidien, avec Ana et son fils Lukas.

Des trottoirs trop hauts, des lieux inaccessibles

En commençant cette promenade, elle constate rapidement une problématique récurrente… Certains trottoirs sont trop élevés et donc difficiles d’accès pour une personne en fauteuil roulant, comme celui de la place des Martyrs-de-la-Libération. « Tous les passages devraient vraiment avoir une autre inclinaison, une sorte de rampe pour que ce soit plus facile car c’est un peu dangereux pour nous », alerte Ana Isabel Gongola.

Certains lieux publics sont parfois impossibles d’accès pour elle et son fils : arrivés devant la Poste ou le conservatoire, rien ne leur permet de rentrer dans ces établissements.

La passerelle souterraine, permettant aux piétons de passer sous les voies ferrées depuis l’avenue Général-Leclerc à l’avenue Pierre-Brossolette, serait elle aussi inadaptée. « Les rampes n’ont pas la bonne inclinaison. C’est même assez dangereux surtout si vous êtes avec un fauteuil roulant avec un adulte. Avec la gravité et le poids, ça peut être un problème », met en lumière Ana Isabel Gongola.

Le cinéma et le centre hospitalier sont en revanche « très faciles d’accès », se réjouit-elle, « tout est plat donc je peux y entrer avec un fauteuil roulant sans problème ».

Pour aller à Paris, repassez par Troyes

« L’alternative que la SNCF nous a proposée pour nous rendre à Paris est de venir à la gare de Romilly et prendre un taxi pour aller à la gare de Troyes pour y prendre le train »
Ana Isabel Gongola, mère deux enfants en situation de handicap

Si elle constate avec satisfaction que le parvis de la gare de Romilly-sur-Seine est accessible, avec notamment des places adaptées aux personnes à mobilité réduite et un accès au guichet facilité par un bâtiment de plain-pied doté de portes automatiques, Ana Isabel Gongola regrette le manque d’installations pour se rendre sur la voie située en face de la gare : « Il n’y a pas de passage (excepté un passage souterrain avec escaliers, NDLR). On se demande pourquoi rien n’avait été fait avant parce qu’il y a beaucoup de personnes qui prennent le train ici et pas seulement des personnes en fauteuil roulant, mais aussi des personnes âgées ou avec des poussettes. »

Elle souligne également que la plateforme d’accès aux trains est trop basse et que les marchepieds des trains sont trop haut.

« L’alternative que la SNCF nous a proposée pour nous rendre à Paris est de venir à la gare de Romilly et de prendre un taxi pour aller à la gare de Troyes pour y prendre le train. Cela voudrait dire un délai d’environ une heure donc cela n’a aucun sens », condamne la mère des deux jumeaux.,

Pour rappel, la mise en accessibilité de la gare de Romilly-sur-Seine est prévue fin 2025 ou début 2026, avec notamment la reconstruction et le rehaussement des quais ainsi que la mise en place de trois ascenseurs.

« D’ici là, il n’y a pas d’autres solutions pour aller sur la voie. Comment la population va-t-elle faire ? L’alternative qui m’a été proposée ne me convient pas alors je vais peut-être devoir traverser les voies pour prendre le train, car c’est notre droit d’aller d’un point A à un point B sans restriction. Je sais que c’est dangereux, mais c’est probablement ce que je ferai », déplore Ana Isabel Gongola, qui considère que les transports « donnent un peu de liberté aux personnes qui sont en fauteuil roulant ».

Pour elle, si l’accessibilité à Romilly-sur-Seine n’est « pas si mauvaise », « il devrait y avoir plus de considérations quant aux trottoirs qui devraient être plus bas pour que la traversée soit plus facile, et également à l’accès à certains lieux comme la Poste mais aussi aux trains. »

« C’est notre droit d’aller d’un point A à un point B sans restriction » : la ville de Romilly est-elle accessible aux personnes à mobilité réduite ?

Par Marylou Prévost