Le futur projet de piste cyclable sur la route de Paris au Mesnil-Esnard est encore loin de voir le jour. Mais il provoque déjà des réactions vives chez les commerçants qui bordent cette voie majeure du plateau est de Rouen déjà souvent engorgée. Poissonnier, pharmacien, patron de bar, boulanger : chacun avance ses arguments pour dire stop à ce projet dont les travaux doivent démarrer en… 2028.

« Non à une rue Jeanne-d’Arc bis » avance l’un, en faisant référence à cette voie du centre-ville de Rouen transformée en zone de partage à 20 km/h, ce qui serait nuisible au commerce selon lui. Un autre dénonce « une piste qui répond à une volonté politique, et pas à un véritable besoin » et qui va provoquer « un manque à gagner énorme » pour les boutiques très denses au cœur de la commune.

« Notre avis ne compte pas »

« Où est-ce que nos clients vont se garer ? Comment va-t-on indemniser 80 commerces, c’est bien autre chose qu’à Franqueville-Saint-Pierre, ça va tousser… Franchement ce projet c’est une hérésie totale. C’est dans l’air du temps, mais il faudrait que ce soit fait de façon intelligente », s’insurge Gilles Porret, patron du Neptune, l’incontournable bar-brasserie-tabac qui tourne sept jours sur sept en face de la mairie.

Non loin de là, moins virulent et cycliste lui-même, le boulanger Sébastien Glad s’inquiète quand même. « Moi je fais du vélo toutes les semaines pour aller à Rouen. Mais on conteste le passage par la route de Paris qui va faire plonger nos chiffres d’affaires. En participant aux réunions de la mairie, on a eu l’impression que tout était déjà prêt et que notre avis ne compte pas », regrette-t-il.

Dans la loi

Le projet de cette future voie cyclable s’inscrit dans le prolongement de celle créée entre Boos et Franqueville-Saint-Pierre, dans le cadre du « projet de requalification de la route de Paris de Franqueville-Saint-Pierre à Bonsecours. La loi Laure impose dans ce type de réaménagement l’installation d’une piste cyclable », indique la Métropole. Des pistes de vélo qui ne sont qu’une composante de la requalification complète de la route de Paris, qui comprend le renouvellement des réseaux souterrains, de l’éclairage public, de la végétalisation, la remise aux normes des passages piétons et des arrêts de bus et… des places de livraison.

Le plan Vélo 2021-2026 de la Métropole de Rouen a vocation à « relier toutes les communes du plateau est, de Bonsecours à la Neuville-Chant-d’Oisel, au sein du réseau express métropolitain ». Dans cette optique, les maires doivent valider ces projets. Au Mesnil-Esnard, le maire, Jean-Marc Vennin, a organisé plusieurs réunions avec les commerçants et cherche des solutions en matière de stationnement.

« Le problème c’est la densité »

« Nous sommes toujours en discussion avec la Métropole. Ici, ce qui rend les choses très compliquées, c’est la densité. La zone de partage envisagée risque d’accentuer encore les bouchons », craint l’élu qui dit comprendre les inquiétudes des commerçants, tout en cherchant déjà des solutions en termes de parkings.

Quant à la possibilité de pistes alternatives, elles n’ont en aucune façon vocation à remplacer celle de la route de Paris. « Elles seront complémentaires et permettront aux usagers de rejoindre établissements scolaires, équipements publics situés sur la commune et aussi de se connecter à d’autres itinéraires cyclables en dehors de son territoire », précise encore la Métropole.

La collectivité met en place une procédure d’indemnisation amiable dans le cadre de ses grands chantiers, qui n’est pas une obligation.

Par Véronique Baud

« Non à une rue Jeanne-d’Arc bis » : près de Rouen, les commerçants vent debout contre le tracé vélo

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