Les documents pour mon appartement à Mykolaïv ne sont toujours pas en règle mais il est déjà l'heure pour moi de rentrer en Suisse. Je me résigne à organiser un copieux dîner d'adieu avec celles que j'espère toujours être mes futures voisines. Là encore, rien ne se passera comme prévu. La bureaucratie va-t-elle l'emporter sur l'esprit d'entreprise? Réponse dans ce sixième et ultime épisode de mes aventures dans l'immobilier ukrainien.

Mon séjour immobilier à Mykolaïv touche à sa fin, et l’heure du départ approche. Raïssa, dont j’espère toujours parvenir à racheter l’appartement, a mis les petits plats dans les grands. Sur la table, il y a des carrés de melon et de pastèque, trois saucissons différents et des canapés au fromage fumé. Pour ma part, j’ai apporté du vin rouge ukrainien mi-sec, de la bière et un peu de vodka locale. C’est à la fois nos adieux et une réunion de copropriété: nous attendons, pour commencer le festin, l’arrivée des deux voisines.

Irina, dont l’appartement est imbriqué dans celui qui sera bientôt le mien, termine dans dix minutes son travail à l’échoppe de fruits et de légumes du coin de la rue. Est aussi prévue Lioudmila, porte de gauche sur le palier et comptable à la retraite, que j’identifie comme la probable propriétaire des quatre chiens bruyants de la cour — elle est en tout cas la seule à les nourrir.

La peur du camp de filtration

Dans le séjour, au pied de la bibliothèque vitrée, de grands sacs débordent de livres et d’habits qui seront bientôt distribués à des amies de Raïssa. L’aquarium et le canapé sont déjà partis. Dès qu’on aura signé la vente de l’appartement, Raïssa se mettra en route, un long voyage en bus qui passe par Minsk, au Bélarus, puis Moscou. De là, elle compte prendre un train pour Almaty, au Kazakhstan, où sa fille tient un salon de beauté. Raïssa est un peu inquiète: son passeport ukrainien va lui valoir un interrogatoire serré dans le camp de filtration que les Russes ont installé à la frontière.

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Le temps passe. Elle soupire et me tend une assiette. Commençons, les voisines ont presque une heure de retard. Toutes deux ont hésité à accepter l’invitation: Irina parce qu’elle est souvent un peu bourrée, le soir, quand elle rentre du marché, et Lioudmila parce qu’elle craint que je lui parle des chiens qui, hier encore, ont mordu les mollets de l’employé venu rétablir le wifi. Mais enfin, elles ont dit oui.

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