CHRONIQUE. Une série à succès qui se pose la question de «la» langue de la Suisse, les déboires de l’enseignement du français outre-Sarine: la question des langues ne s’arrête jamais et le français est une nouvelle fois «under attack»; mais il cache bien sa force, écrit notre chroniqueur

Est-ce qu’il y a encore de vrais Suisses? Il n’y en aurait plus qu’un seul, à en croire la série The Residence, qui fait un tabac sur Netflix actuellement. Dans une Maison-Blanche où s’affaire une bande de branquignols, tout comme dans la vraie vie, un crime a été commis. Les soupçons se portent naturellement sur le chef pâtissier, Didier Gotthard. Un Allemand? Non, Suisse allemand. D’où la perplexité de l’agent du FBI: «Je ne comprends pas la Suisse… Il y a les Suisses allemands, des Suisses italiens, des Suisses français… Mais ça existe un Suisse qui n’est que Suisse?» Réponse de l’excentrique détective et ornithologue Cordelia Cupp: «Roger Federer!». Federer, le roi des Suisses et dernier de la lignée des vrais Helvètes. Si l’on excepte les rares à être à la fois Saint-Gallois et Valaisans. Un roi Federer un peu à la façon du roi des Belges dont on disait, au plus fort de l’éruption de séparatisme flamand, qu’il était le dernier et seul citoyen belge. Les autres habitants du royaume étant Flamands, Wallons ou Bruxellois.

On ne sait pas s’il y a un Suisse dans l’équipe de scénaristes de la série. Mais la réplique tombe à point, au moment où, en Suisse alémanique, certains, comme la ministre zurichoise de l’Instruction publique Silvia Steiner, craignent un repli culturel. Une poignée de cantons, dont Zurich et Saint-Gall, ont en effet à trancher sur des motions demandant de repousser au cycle secondaire l’apprentissage du français. Les enfants, débordés par le programme en primaire et qui doivent déjà passer du dialecte à l’allemand puis à l’anglais, se heurteraient à la complexité grammaticale du français. «Il ne s’agit pas de se débarrasser du français… mais de reporter son enseignement de quelques années», tenait à rassurer, dans Le Temps, l’une des signataires de la motion zurichoise.

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