OPINION. Comme le journalisme, la recherche scientifique a pour mandat de livrer à nos démocraties des informations fondées; les coupes budgétaires affectant la presse scientifique inquiètent les juristes Odile Ammann et Aimée Zermatten, partisanes d’un partenariat durable entre science et médias
Une récente décision de l’entreprise du service public suisse alémanique SRF d’économiser au détriment, entre autres, du journalisme scientifique a suscité un tollé légitime. Une pétition lancée par des chercheuses et chercheurs préoccupés par le futur du journalisme scientifique a recueilli plus de 10 000 signatures. Intitulée «Fakten statt Falschinformationen: für einen starken Wissenschaftsjournalismus!» («Des faits au lieu de fausses informations: pour un journalisme scientifique fort!» ), cette lettre ouverte était adressée à la direction de la SRF, mais aussi de la SRG et aux «politiciennes et politiciens des médias et de la science». Hélas, ces inquiétudes ne datent pas d’hier. L’année dernière, les journalistes scientifiques Theres Lüthi et Cornelia Eisenach, dans un puissant plaidoyer publié dans le média Republik, dressaient le constat suivant: «La recherche est en plein essor, mais de moins en moins de gens la regardent».
Il est primordial que ces préoccupations dépassent la frontière linguistique et qu’une véritable prise de conscience ait lieu dans toute la Suisse. Dans un monde de plus en plus dogmatique, où la désinformation se répand à la vitesse d’un feu de forêt et où le fact checking est remis en question, voire aboli, les dernières restrictions budgétaires, affectant la presse scientifique, mais aussi la formation, la recherche et l’innovation, sont alarmantes. Elles illustrent la fragilité et l’érosion croissante d’institutions pourtant indispensables à la survie de l’Etat de droit et dont on pouvait penser que la protection, garantie depuis longtemps par la Constitution fédérale, était acquise: la recherche scientifique, d’une part, le journalisme, d’autre part.
Voir plus