L’auteur et le réalisateur du film «Game Over – La chute de Credit Suisse», Arthur Rutishauser – également rédacteur en chef de la «SonntagsZeitung» – et Simon Helbling, reviennent sur la fin de Credit Suisse et leur travail sur ce documentaire. Il sera décliné sous forme de série prochainement

Sur les écrans dès ce mercredi, Game Over – La chute de Credit Suisse retrace les cinquante dernières années de la banque, jusqu’à sa reprise en catastrophe par UBS, le 19 mars 2023.

Le Temps: Pourquoi avez-vous choisi de raconter la chute de Credit Suisse en partant du scandale de Chiasso, en 1997?

Arthur Rutishauser: Après ce scandale, Rainer Gut est arrivé à la tête de Credit Suisse et a lancé l’expansion aux Etats-Unis. La banque y a perdu tellement d’argent pendant vingt ans que c’est une des raisons de sa disparition.

A partir de quel moment Credit Suisse ne pouvait-elle plus être sauvée selon vous?

A. R.: Un an avant la chute, la banque d’investissement aurait pu être vendue et le groupe aurait tenu, peut-être avec l’aide de la BNS. Mais pour tourner la page et redresser la banque, il aurait fallu intervenir en 2015 ou 2016, au moment où Tidjane Thiam est arrivé. Par ailleurs, la taille de la banque a commencé à être réduite à partir de 2012. Les coûts étaient trop élevés par rapport à l’activité, mais il n’a jamais été décidé d’arrêter certains métiers. La banque a voulu faire de tout mais moins, et en prenant plus de risques, ce n’était pas la bonne stratégie.

Le film donne l’impression que Credit Suisse a rejeté toutes les initiatives qui auraient pu améliorer sa situation, par exemple lorsque l’éphémère président Antonio Horta-Osorio a voulu mener des réformes. Est-ce le cas?

A. R.: Effectivement, et en plus il n’avait probablement pas une personnalité adaptée à une banque suisse. Mais il ne faut pas oublier que les dirigeants en place à ce moment-là ne voulaient pas de lui.

Quelle opinion avez-vous sur le rapport de la Commission d’enquête parlementaire sur Credit Suisse?

A. R.: Il apporte beaucoup de détails intéressants, sur les faits, mais il n’attribue aucune responsabilité. Les conclusions ne vont pas aider.

Y a-t-il des éléments que vous n’avez pas utilisés dans le film?

Simon Helbling: Oui, et certains étaient très intéressants. L’affaire Credit Suisse a fourni beaucoup d’histoires intéressantes. Ce qui s’est passé n’a pas été bon pour la Suisse ou pour les gens concernés, mais pour un film, c’était très riche. Nous avons montré les histoires les plus fortes ou les plus horribles dans le film. La série qui sortira plus tard les abordera plus en profondeur, avec le même arc narratif.

Avez-vous reçu des pressions pour que le film ne se fasse pas?

S. H. Clairement, parfois très directes. Mais j’ai ressenti beaucoup plus de pression à cause de la responsabilité qu’a un tel film. Pour la Suisse, il est capital que nous parlions de ce qui est arrivé. (S. Ru.)