ÉDITORIAL. En matière de droits des femmes, tout semble possible, tout le temps. Effarant? Oui

Imaginez: des hommes seraient devenus ouvertement machistes, affirmant, cou musclé et biceps mis en valeur, qu’il faut libérer l’énergie masculine et promouvoir l’agressivité au sein de l’entreprise car la virilité aurait été émasculée. On ne verrait plus qu’eux sur les images du chef d’Etat et de son entourage, sauf quand les femmes seraient subitement utiles pour servir le propos. Des femmes elles-mêmes porteraient ce discours conservateur, rêvant d’un retour aux rôles de mère rassurante ou d’épouse séduisante. Surréaliste? C’est pourtant bien ce à quoi nous assistons depuis quelques mois aux Etats-Unis.

Bien sûr, seul le droit compte, cadre indispensable pour que la société évolue. Mais voilà. En 2024, les droits des femmes dans le monde se sont détériorés dans un pays sur quatre, selon l’ONU. En Afghanistan, les filles n’ont plus accès à l’école après 12 ans. En Arabie saoudite, elles sont emprisonnées pour avoir revendiqué plus de droits. En Iran, elles ont l’interdiction de chanter, de rouler à bicyclette, ou de quitter le pays sans l’autorisation de leur mari.

Et aux Etats-Unis? Les droits des femmes sont en recul. A ce jour, 12 Etats américains interdisent l’avortement et de nombreux Etats ont mis en place des limitations. Par certains décrets, Donald Trump a renforcé les restrictions et réduit l’accès à la santé reproductive. Il a interdit d’utiliser le mot «femmes» dans les recherches scientifiques financées par le gouvernement. Lui, le président qui veut «protéger les femmes, qu’elles le veuillent ou non».

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Jamais acquis

Le droit d’une femme de disposer librement de son corps devrait être un fondement intouchable d’une démocratie au XXIe siècle. Simone de Beauvoir l’avait pourtant bien annoncé, même ce droit n’est jamais acquis. En inscrivant l’interruption volontaire de grossesse dans sa Constitution en 2024, la France a voulu se protéger de cette dérive. Mais aujourd’hui, en France et ailleurs en Europe, des mouvements ou des collectifs politisés d’hommes et de femmes ultra-conservateurs ou d’extrême droite s’engouffrent dans la brèche ouverte au sein de la démocratie la plus puissante de la planète.

La Suisse semble à l’abri de ces tendances. La démocratie directe, la culture du compromis et le respect profond des institutions nous protègent de ces dérives dangereuses. Les plus récentes initiatives anti-avortement ont échoué. Il serait pourtant faux de se croire complètement isolé de ce courant d’air glacial. Le 8 mars 2025, célébrons donc les droits des femmes en Suisse. Et soutenons celles qui se battent pour leurs droits dans tous les pays qui ne les respectent pas. En Afghanistan, en Iran, et désormais aux Etats-Unis.

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