ÉDITORIAL. Dans son discours d’investiture, le 47e président des Etats-Unis a déclaré vouloir reprendre le canal de Panama et renommer le golfe du Mexique. L’influence de la Big Tech sur Washington et les politiques radicales annoncées par Donald Trump sont une vraie menace pour la démocratie états-unienne

Des représentants de l’extrême droite européenne, les oligarques de la Silicon Valley aux premières loges lors de la prestation de serment du 47e président des Etats-Unis. L’investiture de Donald Trump n’a rien eu d’habituel. Elle ouvre une ère de grande incertitude outre-Atlantique et dans le monde.

Le républicain a largement gagné la présidentielle américaine. En ce sens, il a la légitimité du peuple. Lui qui voulait être le «dictateur d’un jour» dès son arrivée à la Maison-Blanche fascine les droites extrêmes et national-populistes ailleurs sur la planète. Mais la grandiloquence des politiques que le républicain entend mener, comme l’expulsion massive de 11 millions de sans-papiers, va sans doute buter sur une réalité bien plus compliquée qu’il n’y paraît. Par ailleurs, l’obsession anti-immigrés de Trump, qu’il a exprimée à travers une dizaine de décrets présidentiels signés lundi, pourrait se retourner contre les intérêts économiques des Etats-Unis.

Lire aussi: A Chicago ou au Mexique, la résistance s’organise pour contrer les projets d’expulsion de Donald Trump

D’autres dangers guettent l’Amérique. A commencer par le choix des ministres opéré par le milliardaire de Mar-a-Lago. Une insulte aux institutions. La principale qualité des personnes nommées n’est pas leurs compétences, mais leur loyauté envers Donald Trump. Si Pete Hegseth devait être confirmé par le Sénat pour diriger le Pentagone avec 3 millions de collaborateurs sous ses ordres et un budget de 800 milliards de dollars, il sera sans doute le secrétaire à la Défense le moins apte à la fonction dans l’histoire des Etats-Unis.

La démocratie à un point de bascule

L’avenir du Département de la justice est une autre vive préoccupation. Considéré jusqu’ici comme indépendant de la Maison-Blanche, il pourrait être à la botte de Trump pour mater toute opposition. C’est cette crainte qui a poussé de manière étonnante Joe Biden à pardonner «préventivement», dans ses dernières heures au Bureau ovale, les procureurs enquêtant sur l’assaut du Capitole, l’ex-patron de l’état-major Mark Milley et «Monsieur anti-covid» Anthony Fauci.

Les Etats-Unis resteront-ils le phare qu’ils prétendent être pour les démocraties de la planète? Avec les tons néo-impérialistes de Trump, qui a annoncé, lundi, vouloir reprendre le canal de Panama, avec l’influence sans précédent des oligarques de la Big Tech sur le Bureau ovale et tous les conflits d’intérêts qui peuvent en découler, la démocratie américaine est à un point de bascule. Et nombre de démocrates du monde entier pensent qu’elle ne va pas basculer du bon côté.

Dans son discours d’investiture, Trump, héraut du suprémacisme blanc, a enfin eu l’outrecuidance de vouloir concrétiser le rêve de Martin Luther King. Un ultime doigt d’honneur à la génération des droits civiques.

En images: En images – Trump, une deuxième investiture