Le directeur général de La Poste, Roberto Cirillo, a mis un terme à son mandat. Il avait notamment mené les dernières restructurations du géant jaune et passé six ans au sein de la firme

Comme le révélait SRF vendredi à midi, le directeur général de La Poste, Roberto Cirillo, a démissionné. À peine plus de deux heures après les premières spéculations, le groupe a confirmé son départ à la fin du mois de mars 2025. Début décembre, le site Inside Paradeplatz avait lancé la rumeur d’un départ à venir, pourtant rapidement balayée par l’institution.

Nommé à ce poste en 2018, le Tessinois avait succédé en avril 2019 à Ulrich Hurni, qui avait, comme le rappelle 24 Heures, assuré l’intérim après le départ de Susanne Ruoff en juin 2018, éclaboussée par l’affaire CarPostal. L’homme de 53 ans avait occupé, par le passé, divers rôles au sein de directions dans le secteur privé. Il possède notamment une expérience significative en management et en stratégie.

«Pendant six ans, j’ai eu l’opportunité de diriger l’une des institutions les plus importantes de notre pays et de l’extraire de la crise de confiance qui régnait alors pour en faire une entreprise porteuse d’avenir, déclare Roberto Cirillo par le biais d’un communiqué. «Aujourd’hui, la Poste est plus solide. Le moment est venu de remettre à une nouvelle génération une Poste solide et porteuse d’avenir.»

Moment critique

Sous sa direction, La Poste a mis un accent considérable sur la transformation numérique mais surtout sur la réduction de son réseau. Pour rappel, la firme vit un moment critique de son histoire après avoir annoncé, l’année dernière, la suppression de 170 filiales d’ici 2028, soit un office sur cinq. En septembre dernier Roberto Cirillo indiquait que ces décisions étaient prises indépendamment des oppositions politiques et qu’elles s’inscrivaient dans la stratégie de l’entreprise qui a été définie et qui reste valable.

De son côté, Christian Levrat, président du Conseil d’administration, «regrette vivement» la décision de son directeur. «Grâce à lui, la Poste a pu être menée vers l’avenir. Il l’a fortement marquée de son empreinte et a créé les conditions nécessaires, un fondement solide, lui permettant de continuer à aborder les grands défis qui l’attendent.» Christian Levrat relève notamment l’implantation d’une «stratégie durable et une Direction du groupe forte apte à poursuivre la transformation engagée».

Etonnement au sein de CTT

Au sein de la Comission des transports et des télécommunications (CTT) du parlement fédéral, c’est l’étonnement. «Je n’ai pas les sous-titres», s’étonne Baptiste Hurni, conseiller aux Etats neuchâtelois. Entendez par-là que le Socialiste ne connaît pas les raisons ce départ précipité. «Je peine à en comprendre le moment, poursuit-il. J’ai le sentiment que ces dernières années ont été un long et pénible chemin vers quelque chose de nouveau et je suis surpris qu’il s’en aille au moment où ces préparatifs sont terminés.»

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L’élu PS estime que derrière lui, Roberto Cirillo va laisser «une forte volonté de se tourner vers la numérisation» avec les deux faces de la médaille. «Il y a eu des effets extrêmement positifs comme l’application mobile de La Poste, la manière de gérer les colis ou encore l’identité électronique. En revanche, si je peux être charmé par cette version 2.0, je peine encore parfois à comprendre concrètement où ils veulent en venir. En sabrant les structures actuelles qui jouent un rôle social très important, on perd aussi une partie de ce service universel dans les villages et autres communes du pays.»

Pas assez de moyens?

Sa consœur vaudoise du Conseil national, Brenda Tuosto, abonde. «Nous avons toujours eu de bons contacts avec Roberto Cirillo même si nous n’étions pas d’accord sur une partie de sa stratégie. Mais il faut aussi relever le fait que ça fait des années que La Poste est soumise à la majorité politique actuelle. Le parlement doit clairement lui donner plus de moyens. Et la future direction devra être attentive à renforcer le mandat de service universel de La Poste.»

Egalement membre de la CTT du National, Damien Cottier (PLR) n’est pas moins surpris de cette annonce que ses collègues. «Ça ne fait que six ans et j’ai l’impression que même La Poste regrette un peu le moment de ce départ. Après, c’est quelqu’un qui a fait du bon travail et qui a œuvré à moderniser une structure qu’il faut adapter aux habitudes des usagers. Ce que je regrette c’est que ce n’est jamais idéal de lancer une réforme et de ne pas aller au bout des choses.»

Quant aux accusations de la gauche qui estime que la majorité de droite ne lui a pas donné assez de moyens, Damien Cottier ne tergiverse pas. «Nous n’avons pas la volonté de subventionner le service postal avec l’argent des contribuables. L’entreprise doit être autoporteuse et donc, adaptée aux besoins de ses utilisateurs.»

Départ en mars 2025

Une autre élue fédérale, de la commission compétente pour La Poste, salue l’attitude de Roberto Cirillo. «Il a pris son mandat au sérieux, déployant une énorme énergie et de la passion. Il avait une vision fondée sur la performance économique, ce qui est naturel puisque cela fait partie de son mandat», souligne la sénatrice centriste Marianne Maret (VS).

«C’est d’ailleurs là que réside la difficulté d’un directeur de La Poste: il faut atteindre des objectifs économiques et dans le même temps gérer les attentes de la population et d’une partie des politiciens qui veulent que l’entreprise corresponde totalement à la définition du service public. La tension est permanente.»

Roberto Cirillo restera au sein de l’entreprise jusqu’à fin mars 2025 et sera disponible pour certaines tâches auprès du président du conseil d’administration jusqu’à l’expiration du délai de congé le 31 juillet 2025. Le processus de recrutement a déjà commencé. À partir d’avril 2025 et jusqu’à l’entrée en fonction de la personne en question, Alex Glanzmann, responsable Finances, dirigera le groupe par intérim.

Collaboration: Philippe Boeglin