CHRONIQUE. Les travailleurs plus âgés et même les retraités sont de plus en plus nombreux sur le marché du travail en Suisse. Notre chroniqueuse, chasseuse de têtes, revient sur l’intérêt de pouvoir compter sur ces profils et sur une équipe intergénérationnelle
La transition démographique des babyboomers fait grossir chaque jour un peu plus la cohorte des consommateurs aux cheveux gris, qui sont également un vivier d’employés potentiels pour les entreprises.
Mais qui sont ces seniors? Et quel marché concerne la silver économie? En Suisse, on devient senior à partir de 50 ans, selon la nomenclature utilisée par l’Office fédéral de la statistique. En 2020, la part des personnes âgées de 50 à 64 ans représentait un tiers de la population active. Cette part progressera encore légèrement jusqu’à un pic de 34,9% en 2050 selon l’OFS, mais elle se maintiendra à plus long terme. Les personnes actives quittent le marché du travail à 65,2 ans en moyenne, avec de fortes différences en fonction de la branche économique ou du statut d’activité.
En ce qui concerne les personnes retraitées de 65 à 74 ans, plus d’une personne sur six exerce encore une activité professionnelle après l’âge de la retraite, soit environ 18%. C’est deux fois plus que dans l’UE. La Suisse se situe juste après l’Islande et la Suède, mais avant les Pays-Bas, le Danemark et l’Allemagne.
Quels sont les avantages et les défis d’engager ou de garder des seniors? Selon le contexte, le secteur d’activité et la culture d’entreprise, la présence des seniors est généralement très positive. Les seniors apportent un savoir-faire et une expertise incomparables, qu’ils transmettent aux plus jeunes en les accompagnant au quotidien et en les guidant dans leur développement. Ils assurent aussi le transfert de compétences et la pérennisation des savoirs dans l’entreprise.
Les discussions intergénérationnelles favorisent une approche plus constructive de la gestion de l’entreprise ainsi qu’une vision stratégique plus solide. Elles sont souvent source de créativité ou de solutions innovantes. Elles favorisent aussi la cohésion sociale ainsi qu’un climat de travail apaisé. Pour gérer la pyramide des âges, les entreprises doivent souvent surmonter certains défis, comme l’adaptation des seniors aux nouvelles technologies, les problèmes d’endurance ou de santé au travail ou encore le coût salarial des employés plus âgés. Une entreprise qui valorise les compétences de chacun et qui répartit équitablement les tâches en tenant compte des forces et des besoins performera mieux éthiquement et durablement.
Pour favoriser l’embauche des seniors, les gouvernements cantonaux peuvent proposer des aides aux entreprises ou offrir des opportunités de formation pour maintenir ou développer leurs compétences. L’embauche des seniors est donc une solution porteuse, à condition de lever les freins culturels et organisationnels et de garantir une flexibilité réglementaire.
Mais en favorisant l’embauche des seniors, défavorise-t-on l’embauche des jeunes? Les jeunes travailleurs et les retraités ne sont généralement pas en concurrence, les jeunes cherchant généralement à commencer leur carrière dans des postes offrant des opportunités d’évolution tandis que les retraités privilégient des emplois qui correspondent à leur rythme de travail, souvent à temps partiel. Les entreprises engagent généralement des personnes retraitées quand elles ont besoin de compétences pointues, de maturité ou de personnes disposant d’un vaste réseau de contacts.
Avec le vieillissement de la population, la Suisse fait face à une forte pénurie de main-d’œuvre depuis quelques années déjà. D’ici à 2030, un demi-million de travailleurs pourraient manquer à notre économie. Nul doute que les retraités sont et seront, longtemps encore, l’or gris de notre économie, une force de travail bienvenue avec laquelle il faudra compter.