ÉDITORIAL. Six petites années, puis s’en vont. Après la charismatique Doris Leuthard, le passage de la centriste Haut-Valaisanne au Conseil fédéral ne marquera pas les mémoires

Elle avait pourtant tout pour plaire, Viola Amherd. Proche des petites gens, l’âme alpine, travailleuse, discrète voire timide, mais terrassant malgré tout les fortes têtes de son parti au moment d’accéder au Conseil fédéral, elle incarnait une sorte d’ADN helvétique à elle toute seule.

Première femme à diriger l’armée, elle portait une certaine idée de la durabilité et de l’égalité, mais pas seulement. Sa rondeur souriante ne l’a pas empêchée de convaincre les Suisses de la nécessité d’acheter de nouveaux avions de combat ou d’obtenir une augmentation substantielle de moyens pour l’armée, dans un contexte d’austérité budgétaire. Son ouverture sur l’OTAN ou sur l’Union européenne a contribué ces derniers mois à ce que la Suisse maintienne des relations correctes avec ses partenaires, son entente cordiale avec Ursula von der Leyen était profitable. Et c’est à peu près tout.

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Influence en baisse

Car le rôle de pivot au Conseil fédéral, tenu depuis deux décennies par le Centre – surtout sous la houlette de la redoutable Doris Leuthard – s’est étiolé à grande vitesse avec la Brigande. Beaucoup moins à l’aise que sa prédécesseure sur l’échiquier des grands stratèges de la Coupole, Viola Amherd a préféré s’agripper à ce qui était au départ une punition, le Département de la Défense, plutôt que d’oser bousculer la cour des grands. Ce qu’elle aurait pourtant pu essayer fin 2022, lorsque Simonetta Sommaruga a quitté le prestigieux Département des Transports et de l’Environnement.

Sa famille partisane ne le lui a jamais pardonné cette faiblesse coupable, caractéristique d’un manque d’appétit politique, alors qu’elle aurait pu redonner au Centre un nouvel élan gouvernemental. Depuis, et malgré son année présidentielle, les rumeurs de départ anticipé lui ont collé aux sandales. Sa personnalité réservée n’a jamais réussi à faire oublier ce choix du surplace; le nouveau Centre n’a pas pu s’appuyer sur son éventuelle énergie pour conquérir de nouveaux bastions.

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Dans ce contexte, le départ de Viola Amherd pourrait donner un gros coup de vent dans les ailes de son parti. Car avec la démission du président Gerhard Pfister – qu’on voit bien rebondir au gouvernement – ce sont les deux plus hautes fonctions de la formation qu’il faut désormais repourvoir. Et si possible avec un duo complémentaire et ambitieux. A trois ans des élections fédérales, difficile d’imaginer meilleur scénario pour le Centre. En ligne de mire, évidemment, la reconquête du second siège au Conseil fédéral, perdu en 2003.