Zoran Milanovic est en passe d’être reconduit à la présidence de la Croatie. Un coup dur pour son rival de toujours, le premier ministre Andrej Plenkovic

Le président croate sortant Zoran Milanovic se dirigeait dimanche vers une victoire écrasante à l’élection présidentielle. Il a remporté près de 78% des voix selon les premiers sondages sortis des urnes, un camouflet pour le parti de droite conservatrice HDZ à la tête du gouvernement. Zoran Milanovic, qui avait manqué d’un cheveu de l’emporter au premier tour, arrive très loin devant le candidat du HDZ, Dragan Primorac, qui ne récolterait que 22% des voix.

Ce résultat est un nouveau coup dur pour le HDZ et le premier ministre Andrej Plenkovic, rival politique de toujours de Zoran Milanovic, après un scandale de corruption très médiatisé en novembre.

Lire aussi: Psychodrame en Roumanie: la présidentielle annulée sur fond d’ingérences russes et de manipulations sur TikTok

Contrepoids

Bien que les pouvoirs du président soient limités, il est perçu par les Croates comme un garant des équilibres politiques. Et le scrutin intervient alors que ce pays de 3,8 millions d’habitants est aux prises avec le taux d’inflation le plus élevé de la zone euro, une corruption endémique et une pénurie de main-d’œuvre. L’ancienne république yougoslave a été principalement gouvernée par le HDZ depuis son indépendance en 1991. Mais Zoran Milanovic, ancien premier ministre de gauche, s’est emparé de la présidence en 2020 avec le soutien du principal parti d’opposition, les sociaux-démocrates (SDP).

Personnalité clé de la scène politique du pays depuis près de deux décennies, il a fréquemment usé d’une rhétorique populiste, mettant en cause régulièrement les responsables européens ou locaux. Dimanche, après avoir voté, il a à nouveau critiqué Bruxelles, selon lui «à bien des égards autocratique et non représentatif».

«Milanovic est une sorte d’omnivore politique», explique l’analyste politique Zarko Puhovski, affirmant que le président est largement considéré comme le «seul contrepoids, au moins symbolique, au gouvernement et au pouvoir de Plenkovic». Son style a fait grimper sa popularité et a contribué à attirer le soutien d’électeurs de droite.

Lire aussi: En Roumanie, l’avènement de Calin Georgescu, l’ultranationaliste pro-russe que personne n’a vu venir

Patriotisme et famille

Son rival, Dragan Primorac, ancien ministre de l’Education et des Sciences de retour en politique après 15 ans d’absence, a fait campagne comme un rassembleur pour la Croatie, insistant sur le patriotisme et les valeurs familiales. «Mon message est toujours le même: la Croatie passe toujours en premier pour moi», a déclaré cet homme de 59 ans aux journalistes après avoir voté à Zagreb.

Pour Djuro Knezicic, électeur et retraité de 62 ans, les «bonnes relations internationales» de Dragan Primorac auraient été une chance d’obtenir «une bien meilleure coopération internationale pour la Croatie». Mais les critiques affirment que son manque de charisme lui a coûté le ralliement de la base du HDZ.

Lire aussi: Plusieurs arrestations après l’attaque d’un canal clé au Kosovo, sur fond de tension avec la Serbie

«Acteur russe»

Zoran Milanovic a condamné l’invasion de l’Ukraine par la Russie, mais il a aussi critiqué le soutien militaire de l’Occident à Kiev, et s’affiche comme opposant notoire à un programme qui aurait vu des soldats croates aider à former les troupes ukrainiennes en Allemagne. Cela lui a valu des accusations de «marionnette prorusse» par le HDZ.

«La défense de la démocratie ne consiste pas à dire à tous ceux qui ne pensent pas comme vous qu’ils sont des 'joueurs russes'», a-t-il répondu dimanche devant des journalistes. De leur côté, les jeunes Croates ont exprimé leur frustration face au manque de discussions entre les dirigeants politiques sur les questions qui les intéressent, comme le logement ou le niveau de vie des étudiants.

«Nous les entendons (les hommes politiques) parler principalement de sujets anciens et recyclés. Ce qui est important pour les jeunes ne leur traverse même pas l’esprit», a dénoncé Ivana Vuckovic, une étudiante de 20 ans.