Maria Corina Machado est apparue, jeudi, pour la première fois en public depuis fin août. Le gouvernement vénézuélien a démenti avoir enlevé l'opposante à l'issue d'une manifestation, évoquant une «invention» de l'opposition

L'opposition vénézuélienne a dénoncé le bref «enlèvement» de sa cheffe Maria Corina Machado, jeudi à la fin d'une manifestation contre Nicolas Maduro, ce que réfute le gouvernement. Cet incident intervient la veille de l'investiture du président socialiste.

«En quittant le rassemblement, Maria Corina Machado a été interceptée et renversée de la moto qui la transportait. Elle a été emmenée de force. Pendant son enlèvement, elle a été forcée d'enregistrer plusieurs vidéos et a été relâchée par la suite», affirme l'équipe de l'opposante sur les réseaux sociaux.

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«Aujourd'hui, le peuple courageux a montré comment vaincre la peur», a déclaré un peu plus tard l'opposante sur X, en remerciant ses partisans descendus dans la rue. Se disant «en lieu sûr et plus déterminée que jamais à continuer (...) JUSQU'AU BOUT» , elle a évoqué «un Vénézuélien blessé par balle lorsque les forces répressives» l'ont arrêtée et a promis de parler «demain de ce qui s'est passé et de ce qui vient».

Le gouvernement dénonce un «mensonge»

Le gouvernement vénézuélien a rejeté les accusations de l'opposition, évoquant une «invention, un mensonge», selon l'expression du ministre de l'Intérieur, Diosdado Cabello.

Une énigmatique vidéo est apparue sur les réseaux sociaux, dans laquelle on voit Maria Corina Machado dire qu'elle est saine et sauve, précisant avoir perdu ses affaires. Cette vidéo a été diffusée et relayée par des médias proches du pouvoir, par le porte-parole du gouvernement Freddy Nanez ou la vice-présidente Delcy Rodriguez. L'opposition quant à elle ne l'a pas relayée.

Première apparition publique depuis cet été

L'apparition jeudi de la cheffe de l'opposition vénézuélienne en public pour la première fois depuis fin août était un des événements attendus de la manifestation. Elle vit dans la clandestinité depuis juillet, le président Maduro l'ayant accusée d'être une «criminelle» qui méritait la prison.

Pour échapper à une arrestation lors des grandes mobilisations d'août, Maria Corina Machado, 57 ans, a pris l'habitude d'apparaître subitement à un coin de rue pour monter sur un camion-podium et haranguer la foule avant de disparaître rapidement en moto.

Jeudi, elle est une nouvelle fois arrivée en camion vêtue de blanc, brandissant un drapeau vénézuélien, et a prononcé un court discours dans lequel elle a lancé: «Tout le Venezuela est dans la rue, nous n'avons pas peur! A partir d'aujourd'hui, nous entrons dans une nouvelle phase. Le Venezuela est libre!». Elle a ensuite quitté les lieux en moto.

Les autorités avaient massivement déployé les forces de l'ordre dans le pays, particulièrement dans la capitale.

Inquiétudes de la communauté internationale

Terminant une tournée qui l'a menée notamment à Washington, Edmundo Gonzalez Urrutia, le candidat de l'opposition qui revendique la victoire face à Nicolas Maduro et s'est exilé en Espagne en septembre, avait exigé «en tant que président élu» sa «libération immédiate». Plus tard, il a souligné: «(C'est) très grave! Le fait que Maria Corina soit libre ne minimise pas les faits (...) Elle a été kidnappée dans des conditions violentes.»

Le gouvernement espagnol a exprimé son «inquiétude» et sa «condamnation totale» devant la nouvelle de la détention de Maria Corina Machado.

Le futur président américain Donald Trump a affirmé que la cheffe de l'opposition vénézuélienne et le «président élu» Gonzalez Urrutia étaient des «combattants de la liberté» auxquels il ne fallait pas «faire de mal». Au Chili, le président de gauche Gabriel Boric a exhorté à «faire tous les efforts internationaux pour que soient rétablies la loi et la démocratie» au Venezuela.

L'opposition revendique la victoire d'Edmundo Gonzalez Urrutia à la présidentielle du 28 juillet. Elle assure que les procès-verbaux des bureaux de vote qu'elle a recueillis prouvent que l'ancien diplomate a remporté le scrutin haut la main – plus de 67% des voix – face à «un régime qui se sait battu» et isolé sur le plan international. Le Conseil national électoral (CNE) a proclamé le président sortant vainqueur du scrutin avec 52% des voix, mais sans publier les procès-verbaux, se disant victime d'un piratage informatique. Une hypothèse jugée peu crédible par de nombreux observateurs.

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