Depuis la confirmation de la victoire du Frelimo à la présidentielle, les actes de vandalisme et de violence se sont multipliés au Mozambique. Le chef de la police craint que les fugitifs se regroupent avec d'autres criminels

Profitant de l'agitation au troisième jour des troubles au Mozambique qui ont éclaté après la confirmation de la victoire du Frelimo au pouvoir, 1534 détenus se sont évadés mercredi d'une prison de haute sécurité de Maputo, située à une quinzaine de kilomètres de la capitale, a annoncé dans la soirée Bernardino Rafael, chef de la police nationale lors d'une conférence de presse. Parmi les évadés, 33 ont été tués et quinze blessés lors des affrontements qui ont suivi avec le personnel pénitentiaire, a-t-il précisé.

Les opérations de recherche dans la foulée, appuyées par l'armée, ont permis d'arrêter quelque 150 de ces fugitifs.

Parmi les prisonniers évadés, figurent une trentaine de détenus liés aux groupes armés djihadistes qui sèment la terreur depuis sept ans dans la province septentrionale du Cabo Delgado. «Nous sommes particulièrement préoccupés par cette situation», a commenté le chef de la police.

Mercredi, des groupes de manifestants se sont approchés de la Prison centrale et ont créé de la confusion et du bruit, suscitant de l'agitation au sein de la prison où des détenus ont fini par faire tomber un mur par lequel ils se sont échappés, a-t-il expliqué.

L'opposition dénonce des fraudes

En dépit des irrégularités soulevées par nombre d'observateurs lors des élections du 9 octobre, le Conseil constitutionnel a confirmé lundi que le candidat du Frelimo, le parti au pouvoir depuis l'indépendance en 1975, avait gagné l'élection présidentielle avec 65,17% des voix.

L'opposition, emmenée par un charismatique ex-commentateur de la télévision passé dans la clandestinité à l'étranger, Venancio Mondlane, réclame une «justice électorale», appelant à manifester pour dénoncer cette élection «volée».

Nombre des 33 millions d'habitants de ce pays africain lusophone tablaient sur ces élections pour tourner la page du Frelimo, mais la durée du mouvement de protestation a surpris les observateurs, dans un pays encore hanté par la guerre civile (1975-1992).

Des commerces vandalisés, des barricades érigées

La boutique d'une compagnie de télécom vandalisée à Maputo, le 24 décembre 2024. — © AMILTON NEVES / AFP
La boutique d'une compagnie de télécom vandalisée à Maputo, le 24 décembre 2024. — © AMILTON NEVES / AFP

Des barricades restaient érigées mercredi dans plusieurs quartiers de la capitale, filtrant les rares véhicules tentant de circuler, et des actes de vandalisme se sont poursuivis.

Outre les boutiques et bâtiments publics déjà mis à sac depuis lundi, plusieurs ambulances ont été incendiées tout comme un dépôt de médicaments et d'autres commerces de proximité, a constaté un correspondant de l'AFP.

Certains manifestants avaient dressé des tables dans la rue, pour continuer à occuper le terrain tout en fêtant Noël en famille ou avec leurs voisins, a constaté l'AFP dans plusieurs quartiers populaires de Maputo. Quelques riverains s'aventuraient dehors, tentant d'acheter à boire et à manger mais beaucoup de supermarchés ont été vandalisés et seules quelques épiceries de quartier ont timidement rouvert, pendant quelques heures.

Des centaines d'«actes de violences graves» recensés

Une barricade en feu à Maputo, le 24 décembre 2024. — © AMILTON NEVES / AFP
Une barricade en feu à Maputo, le 24 décembre 2024. — © AMILTON NEVES / AFP

Deux mois de manifestations, de grèves et de blocages ont déjà coûté la vie à au moins 150 personnes, selon plusieurs bilans croisés d'ONG.

Le gouvernement mozambicain a annoncé mardi soir un bilan de 21 morts, dont deux policiers, en seulement 24 heures. Il n'a pas avancé de bilan pour la journée de mercredi.

Le ministre de l'Intérieur Pascoal Ronda a aussi répertorié 236 «actes de violences graves» entre lundi soir et mardi soir. Il a précisé que «des groupes d'hommes munis d'armes blanches et d'armes à feu avaient mené des attaques» contre notamment onze commissariats ainsi qu'une prison déjà, d'où 86 détenus s'étaient échappés mardi.

Le chef de la police a affirmé mercredi soir craindre que ces fugitifs se regroupent, avec d'autres criminels, ce qui pourrait aggraver l'insécurité dans les prochains jours au Mozambique.