L’archéologue et penseur français a su décrypter Néandertal comme personne avant lui. Mais au-delà de la créature disparue voilà plus de 40 000 ans, c’est bien de Sapiens qu’il veut nous parler: notre nature, notre avenir en suspens, mais aussi nos espoirs
Il vit au sud-ouest de Toulouse, et c’est un combat pour aller jusqu’à lui. D’abord vaincre un interminable enchaînement de collines et de routes étroites comme une pointe de silex. Une fois au village, passer une dernière grille, un dernier arbre pour enfin trouver le presbytère en ruine qu’il a retapé avec sa compagne – c’est superbe, ça suinte le mystique et l’indestructible. Il n’est guère plus simple à dénicher en été, quand il s’exile pour deux mois dans la grotte de Mandrin, tout près de Montélimar. Son passe-temps: tout balayer au pinceau et à la pince à épiler pour dénicher des vestiges du passé. Et avec son look cheveux et barbe façon capitaine Caverne, il semble cocher toutes les cases de l’ermite qui veut fuir le monde. Mais c’est en fait tout le contraire.
Ludovic Slimak s’intéresse aussi bien aux vivants d’aujourd’hui qu’à ceux qui nous ont précédés. Ses envies de partage l’ont conduit à publier trois livres, pour un voyage qui mêle archéologie et ethnographie. Et puisque l’adage veut que celui-ci compte davantage que la destination, dévoilons dès ici les contours de sa conclusion: Sapiens serait arrivé beaucoup plus tôt que prévu en Europe, vers -54 000 ans, et il aurait cohabité pendant des millénaires avec Néandertal. Une coexistence probablement pacifique entre les deux humanités, qui ont semble-t-il échangé dans le sens inverse de l’histoire officielle. Des interprétations consécutives à la découverte de dents de lait et de silex, et à l’analyse des suies de la grotte de Mandrin qui permettent désormais de dater les passages de population à six mois près.
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