ÉDITORIAL. Les projets autoroutiers soumis en votation le 24 novembre sont pragmatiques et ciblés. Les refuser reviendrait à bloquer toute amélioration sur cette épine dorsale de la Suisse qu’est l’A1. Cela rouvrirait la guerre des transports, que le pays a mis trente ans à apaiser

Planifiée dans les années 1950 pour cinq fois moins de véhicules, inaugurée en 1964, l’A1 entre Lausanne et Genève est une autoroute vétuste, étroite, complètement engorgée. Les bouchons y sont endémiques. Le trafic n’en finit plus de déborder, asphyxiant les villages environnants. Si personne ne nie ce constat, l’élargissement de l’autoroute sur 19 kilomètres entre Nyon et Le Vengeron, l’un des six projets de la votation du 24 novembre, donne lieu à un affrontement féroce.

Cette bataille de chiffres et d’experts masque le fait que les échanges sont avant tout idéologiques et émotionnels, sur fond de dérèglement climatique. S’enfermant dans un débat pour ou contre la voiture, la campagne est passée à côté du vrai enjeu, celui des infrastructures au service de la population. Il est nécessaire de prendre un peu de recul.

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Avec le paquet soumis au vote, on est loin des «méga-autoroutes» que dénoncent les opposants. Il n’est aucunement question de construction de nouvelles routes. Les différents projets concernent des améliorations ciblées sur des points noirs du réseau pour en améliorer la fluidité. Ceux-ci sont situés aux abords des grandes villes, comme Bâle ou Berne, là où les autoroutes, prévues pour le transit, se sont muées en quasi-périphériques.

Croissance démographique

Choisir aujourd’hui de ne plus investir sur le long terme dans les autoroutes, l’épine dorsale du réseau routier, serait irresponsable, alors que la croissance démographique va mettre toujours plus de pression sur ces artères déjà congestionnées. Accepter ces projets ne remettrait pas en cause le développement du trafic ferroviaire sur l’Arc lémanique, dont plus personne ne conteste la nécessité depuis le fameux «trou de Tolochenaz» en 2021.

Le rail est dorénavant clairement la priorité. Deux milliards vont être injectés dans le chantier de la gare de Genève, presque autant dans celui de la gare de Lausanne, où les retards sont techniques et non politiques. Sans oublier le Léman Express inauguré en 2019 ou encore le récent feu vert pour le futur tunnel Morges-Perroy, budgété à lui seul à 1,3 milliard. Toutes ces sommes sont à mettre en regard des 900 millions que coûterait l’élargissement de l’A1.

Enfin, un non le 24 novembre rouvrirait les plaies d’une guerre des transports que la politique suisse a mis trente ans à refermer. Une paix consacrée par le peuple en 2014 et 2017 par l’acceptation de fonds distincts pour le rail et la route. Dans un contexte toujours plus polarisé, personne n’a rien à gagner à rouvrir les fronts. En tout cas pas les défenseurs du transport ferroviaire.