Le Genevois Valentin Rossier adapte et joue avec doigté «Au-delà de cette limite votre ticket n’est plus valable», roman caustique et cru, qui touche à l’Alchimic

Il fallait le faire. Oser franchir cette limite. Romain Gary a 60 ans à peine quand il publie Au-delà de cette limite votre ticket n’est plus valable (Editions Gallimard). Il a fait la guerre dans les airs – un chevalier du ciel –, il a vécu avec Jean Seberg, actrice androgyne qui a subjugué Jean-Luc Godard, puis tout Hollywood, il a publié des romans qui sont un pied de nez au désespoir, dont Les Racines du ciel, qui lui a valu le Prix Goncourt. Et voilà qu’il décrit par le menu les tourments d’un héros qui lui ressemble peut-être, Jacques Rainier, chef d’entreprise tout-puissant, soudain rattrapé par la hantise d’une sexualité hivernale, c’est-à-dire molle.

Il fallait le faire (bis). Oser adapter ce récit-là, bravache et cru, passé presque inaperçu à sa parution en 1975, tant les milieux littéraires parisiens sont alors accaparés par l’avènement d’un autre auteur, bien plus original que ce qu’est devenu selon eux Gary, un certain Emile Ajar – Gary lui-même qui publie au même moment Gros-Câlin. Le comédien romand Valentin Rossier adapte, monte et joue cette confession d’un Roi-Soleil des alcôves qui découvre que son sceptre branle. A l’Alchimic, cette salle genevoise presque toujours bondée, il est à la hauteur du sujet, en Dom Juan rongé par les ombres, bien entouré par Mauro Bellucci, Vincent Jacquet et Michelle Shapa.

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