Le saxophoniste canado-haïtien sortait il y a peu une longue fresque musicale célébrant la révolte du Bois-Caïman. Rencontre avec un musicien envoûtant

«Je ne t’ai pas oubliée, je t’ai omise», nous dit Jowee Omicil. Il est 11h du matin, au Café crème, non loin de République. L’interview commence par cette punchline amusante. La veille, on avait attendu le saxophoniste sous les micocouliers derrière la butte Montmartre, plongée dans Alejo Carpentier Le Royaume de ce monde: «Le tonnerre semblait se briser en avalanche sur les profils rocheux du Morne Rouge. Cette pluie d’août, qui de tiède devenait froide, tombait toujours plus dru depuis qu’avait sonné le couvre-feu des esclaves.»

Pour l’histoire, en cette nuit du 14 août 1791, la peur change de couleur. La légende orale évoque 200 Noirs, hommes et femmes, déjà créoles ou encore bossales, esclaves en fuite et affranchis, tous réunis au lieu-dit du Bwa Kayiman. Cette réunion d’esclaves marrons signe l’acte fondateur de la révolution qui conduira à l’indépendance d'Haïti. Justement, le saxophoniste canado-haïtien improvise autour de cette cérémonie et son Bwa Kayiman Freedom Suite, sorti cette année, est comme une incantation enregistrée en une seule prise. Un rituel «magique», nous explique le musicien.

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